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COMMUNIQUES DE PRESSE - page 6

Communiqué Cabinet d’avocats Jus Cogens : Un examen médical d’Ali AARRASS prouve qu’il a été torturé : que fait la Belgique pour son ressortissant ?

dans AVOCATS/COMMUNIQUES DE PRESSE/TORTURE par

dounia alamat5 juin 2013 – COMMUNIQUE DE PRESSE

 CABINET D’AVOCATS JUS COGENS – Me Christophe MARCHAND (GSM: 32.486.32.22.88 ; cm@juscogens.be) – Me Dounia ALAMAT (GSM: 32.470.57.59.25 ; da@juscogens.be) – Me Nicolas COHEN (GSM : 32.470.02.65.41 ; nc@juscogens.be)

(photos Maitres Alamat, Marchand et Cohen)

 Affaire Ali AARRASS – Un examen médical d’Ali AARRASS prouve qu’il a été torturé : que fait la Belgique pour son ressortissant ?

 Après avoir été férocement torturé dans les geôles du Royaume chérifien du Maroc, et depuis sa sortie de garde-à-vue, le 24 décembre 2010, Ali AARRASS dénonce les terribles sévices qui lui ont été infligées afin qu’il signe des aveux.

 Il s’est adressé sans relâche aux autorités marocaines : Procureur du Roi, Juge d’instruction, Tribunal correctionnel et Cour d’appel de Rabat, afin qu’une enquête effective et indépendante soit menée sur ses allégations de torture.

 Rien n’y a fait.

 Le 1er octobre 2012, il a été condamné à douze ans d’emprisonnement par la Cour d’appel de Rabat, uniquement sur base de ses aveux, extorqués par la torture.

 Le 20 septembre 2012, Ali AARRASS avait cependant reçu la visite du Rapporteur spécial contre la torture des Nations Unies, Monsieur MENDEZ, accompagné d’un médecin légiste spécialisé en matière d’évaluation des séquelles de la torture.

 Ce 31 mai 2013, le courrier adressé par le Rapporteur spécial des Nations-Unies contre la torture au Gouvernement marocain, suite à cette visite à Ali AARRASS, a été rendu public.

Christophe Marchand Les traces physiques et psychologiques de la torture infligées à Ali AARRASS ont bien été constatées. Ainsi, le Rapporteur spécial contre la torture écrit :

 « Le médecin légiste indépendant qui accompagnait le Rapporteur spécial a effectué un examen physique externe et trouvé des traces de torture sur le corps de M. Aarrass. Le médecin légiste a conclu que la plupart des traces observées, bien que non diagnostiquées comme signes de torture, sont clairement compatibles avec les allégations présentées par M. Aarrass, à savoir le genre de torture et de mauvais traitements infligés, tels que brûlures occasionnées par une cigarette, pratique du «falanja » (coups assenés sur la plante des deux pieds), attachement intense puis suspension par les poignets et électrochocs aux testicules. En outre, il a constaté que la description faite par M. Aarrass des symptômes ressentis après les épisodes d’actes de torture et de mauvais traitements est totalement compatible avec les allégations et que le genre de pratiques décrites et les méthodologies qui auraient été suivis par les agents pratiquant ces actes, coïncident avec les descriptions et les allégations présentées par d’autres témoignages que le Rapporteur spécial a reçus dans d’autres lieux de détention et qui ne sont pas connus de M. Aarrass. Il a conclu que certains de ces signes seront de moins en moins visibles avec le temps et, à terme, devraient disparaître comme ceux, par exemple, existants sur la plante des deux pieds. Il a également conclu que l’examen physique a uniquement été effectué sous lumière artificielle. »

 Dans cette missive, le Rapporteur spécial contre la torture attire l’attention du Maroc sur les divers textes internationaux aux termes desquels il s’est engagé à interdire l’usage de la torture, à interdire que soient utilisées en justice des preuves recueillies sous la torture, à obliger les Procureurs et les Juges à enquêter impartialement sur les allégations de torture et à interdire tout acte d’intimidation et/ou de menace à l’égard des plaignants. Obligations internationales violées par le Maroc dans le cas d’Ali AARRASS.

 Le Maroc n’est cependant pas le seul Etat à avoir violé les droits fondamentaux d’Ali ARRASS. L’Espagne a également sa large part de responsabilité dans les atrocités subies par Ali AARRASS. Cet Etat a en effet décidé, en pleine connaissance de cause, de l’envoyer à ses bourreaux alors que le Comité des droits de l’homme des Nations Unies avait pris une mesure provisoire en sens contraire.

 L’utilisation de la torture à l’égard des personnes suspectées de terrorisme, par le Maroc, est d’ailleurs un secret de polichinelle. Cette situation est dénoncée par l’ensemble des associations de défense des droits de l’homme – Amnesty International, Human Right Watch, Alkarama, pour n’en citer que quelques une.

 Sur cette base, la Cour européenne des droits de l’homme a d’ailleurs constaté, dans un arrêt Boutagni contre France, que l’éloignement vers le Maroc d’un individu pour des faits de terrorisme constituerait une violation de l’article 3 de la Convention (1). La Cour a réitéré cette constatation en condamnant la France dans un arrêt tout récent du 30 mai 20132 (2).Maitre Nicolas Cohen

 Et la Belgique, dans cette affaire ?

 Depuis son incarcération en avril 2008 en Espagne, Ali AARRASS tente en vain d’obtenir la protection de la Belgique.

 Dans un premier temps, au nom de la confiance mutuelle devant prévaloir entre Etats européens, la Belgique a refusé toute assistance à Ali AARRASS. Puis, sur insistance de ses conseils, le consul belge à Madrid a décidé de rendre visite à Ali AARRASS, mais trop tard. Ali AARRASS venait d’être extradé illégalement.

 Depuis son extradition au Maros, c’est un autre prétexte qui est utilisé par le Ministère des affaires étrangères pour refuser d’intervenir et d’assurer la protection diplomatique à laquelle Ali AARRASS a droit. La Belgique se retranche en effet derrière une Convention datant de 1930 et argue de la « double » nationalité d’Ali AARRASS pour ne rien faire pour lui, même pas demander l’autorisation de lui rendre visite. Or, le Maroc n’est pas partie à cette Convention, de sorte que la Belgique n’est pas liée envers le Maroc par ce texte. De plus, l’interdiction de la torture est une norme droit international impérative, de sorte qu’elle prime sur tout autre texte.

 Si la Belgique pouvait jusqu’il y a peu se voiler la face en alléguant de manière éhontée qu’Ali AARRASS n’avait pas rapporté la preuve de la torture encourue, tel n’est plus le cas aujourd’hui.

 ali aarrass pasportDans ces circonstances, Ali, AARRASS, sa famille et ses proches espèrent que la Belgique prendra enfin ses responsabilités et assurera, pour l’avenir, toute la protection due à son ressortissant. Nous espérons également que le Maroc respectera enfin ses engagements internationaux, mènera une véritable enquête à propos des allégations de torture, punira les fonctionnaires responsables et rendra la liberté à Ali AARRASS afin que cesse son calvaire.

notes

1. CEDH, Boutagni c. France, 18 novembre 2010, requête no 42360/08, disponible sur http://hudoc.echr.coe.int/sites/fra/Pages/search.aspx#{« fulltext »:[« Boutagni »], »itemid »:[« 001-101767 »]}

2. CEDH, Rafaa c. France, 30 mai 2013, requête n° 25393/10

 

Amnesty International (rapport 2013) sur le Belge Ali Aarrass : « extradition illégale et torture » (français, English)

dans COMMUNIQUES DE PRESSE/EXTRADITION/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS/TORTURE par

Français : Extrait Amnesty International Rapport 2013 La situation des droits humains dans le monde :

« Maroc : Lutte contre le terrorisme et sécurité

Les personnes soupçonnées d’actes de terrorisme, entre autres infractions liées à la sécurité, risquaient d’être torturées ou maltraitées et de ne pas bénéficier d’un procès équitable.

Ali Aarass, reconnu coupable en novembre 2011 d’appartenance à une organisation terroriste, a vu sa peine de 15 ans d’emprisonnement ramenée à 12 ans par la cour d’appel de Salé. Un recours en cassation était en instance à la fin de l’année. Cet homme avait été extradé par l’Espagne vers le Maroc en décembre 2010, en violation de mesures provisoires ordonnées par le Comité des droits de l’homme [ONU] car il risquait d’être torturé et maltraité au Maroc. Il aurait été contraint de faire des « aveux » sous la torture.

En août, le Groupe de travail sur la détention arbitraire [ONU] a conclu que la détention de Mohamed Hajib, ressortissant germano-marocain, était arbitraire ; il a demandé au gouvernement marocain de remettre cet homme en liberté. Mohamed Hajib avait été déclaré coupable en 2010 d’infractions liées au terrorisme sur la base d’aveux qui auraient été obtenus sous la torture pendant sa détention provisoire, en l’absence d’un avocat. Il avait été condamné à une peine de 10 ans d’emprisonnement, qui a été ramenée à cinq ans en janvier. Il était maintenu en détention à la fin de l’année. Ses allégations de torture n’ont pas fait l’objet d’une enquête. »

English : excerpt from Amnesty International Annual Report 2013 The State of the Human rights in the world

 « Morocco : Counter-terror and security

 People suspected of terrorism or other security-related crimes were at risk of torture or other ill-treatment and unfair trials.

 Ali Aarrass, who was convicted of belonging to a terrorist organization in November 2011, had his 15-year prison sentence reduced to 12 years by the Sale Court of Appeal. A further appeal to the Court of Cassation was pending at the end of the year. He had been extradited from Spain to Morocco in December 2010 contrary to interim measures issued by the UN Human Rights Committee due to a risk of torture and other ill-treatment in Morocco. He was reported to have been made to « confess » under torture.

 In August, the UN Working Group on Arbitrary Detention declared the detention of Mohamed Hajib, a Moroccan/German national, to be arbitrary, and urged the Moroccan authorities to release him. He was convicted of terrorism offences in 2010 on the basis of a confession allegedly obtained under torture while he was held in pre-trial detention and denied access to a lawyer. Mohamed Hajib received a 10-year prison sentence, reduced to five years in January. He was still held at the end of the year. The authorities did not investigate his torture allegations. »

AI Rapport 2013 : Le Maroc et Sahara Occidental

AI Report 2013 : Morocco/Western Sahara

Ali Aarrass, from his prison cell in Salé :  » Everything becomes so clear when you’re deprived of liberty ».

dans ACTIONS/COMMUNIQUES DE PRESSE par

Everything becomes so clear when you’re deprived of liberty. Not to abuse each other. To understand each other despite your differences – it’s so easy and so beautiful when it happens spontaneously, when it comes from your own free will. Here in prison we learn to support and accept each other, and our faults, small or large, are no big thing beside the fact of the injustices we have all suffered. 

Prison is a whole world, all the routines of daily life go on there, but all under constraint. Nothing is done with the pleasure of being able to make ones own choices.

Dear friends, make use of the happiness and pleasure which liberty brings you to act freely to fight against the barriers separating you from each other.

Stay united. From inside my cell, this is my vision, this is what would make everything go better.

(translated from Spanish by his sister Farida and into English by Frances Webber)

Un message émouvant d’Ali Aarrass de la prison de Salé : « Tout devient si clair lorsque vous êtes privé de liberté »

dans ACTIONS/COMMUNIQUES DE PRESSE par

Tout devient si clair lorsque vous êtes privé de liberté. Ne vous malmenez pas les uns les autres. Entendez vous malgré vos différences, c’est si facile et si beau quand cela est fait spontanément. Quand cela vient de votre propre volonté. Ici en prison nous apprenons à nous supporter et même les défauts des uns et des autres, du plus insignifiant au plus grave, ne représentent pas grand chose à côté de ce que chacun de nous a subi comme injustices.

 La prison est un monde, toute une vie avec ses quotidiens s’y déroule, mais tout est contrainte et plus rien n’est fait avec le plaisir de pouvoir faire ses propres choix.

Chers amis, profitez du bonheur et du plaisir que vous procure « la liberté » d’agir libres de combattre les obstacles qui tenteraient de vous éloigner les uns des autres.

 Restez unis. De l’intérieur de la prison, c’est ma vision… celle qui ferait que tout irait bien mieux.

(traduit de l’Espagnol par sa sœur Farida)

 

Les détenus européens dans les prisons marocaines et leurs familles s’organisent

dans ACTIONS/COMMUNIQUES DE PRESSE/DOUBLE NATIONALITE par

Communiqué du 30 novembre 2012

« C’est au nom du comité des familles des prisonniers européens détenus au Maroc que nous vous envoyons ce communiqué pour dénoncer le mépris et l’abandon affichés par nos responsables en ce qui concerne le sort et les conditions de vie de nos frères , maris, fils , amis. Même leurs grèves de la faim préventives de trois jours les 22,23 et 24 octobre 2012 pour justement les alerter sur la grave situation qu’ils vivent n’ont rien changé.

Certains sont innocents et ont été torturés.

Pour la plupart d’entre eux les conditions carcérales sont inhumaines.

Ils sont rackettés, ce qui nous coûte très cher.

Et tant d’autres choses qu’ils n’ont pas cessé de dénoncer, pour beaucoup au dépens de leur intégrité physique.

Nous sommes constitués aujourd’hui de plusieurs familles espagnoles , françaises , belges , hollandaises , italiennes et portugaises, dont le premier pôle se trouve a Bruxelles et est géré par le militant Luk Vervaet (vervaetluk@gmail.com tel: 0032 478 653 378).

Nous tenons absolument a mettre en lumière les responsabilités des politiques, des gouvernements et de la communauté européenne dans ce qui devient aujourd’hui à l’évidence une complicité dans les cas de tortures et une complaisance dans leurs conditions en général.

Cela fait des années pour beaucoup que le mutisme et l’indifférence de la part des responsables tue a petit feu.

Nous profitons donc de l‘approche du 10 décembre, journée mondiale des droits de l’homme, pour tirer la sonnette d’alarme sur le sort que vivent ces prisonniers et nous, leurs familles. »

 

Communiqué mai 2012

« Ce courrier est destiné aux responsables européens, aux représentants des institutions des droits de l’homme et à qui veut l’entendre.

Nous sommes les détenus européens incarcérés à la prison de Salé au Maroc.

Ceci est un cri de désespoir qui a pour but d’interpeller toute la communauté européenne de notre cauchemar.

Ce n’est qu’après l’entrée du Maroc au statut avancé par l’UE et toutes les garanties, presentées par le Royaume (Respect de droits de l’homme, justice respectant ses propres fondements, conditions carcérales humaines) que nous faisons l’obligation de vous faire parvenir notre situation désastreuse.

Dans un premier temps, en ce qui concerne les arrestations et les gardes à vus.

Nous sommes passés à tabac par des policiers sans scrupules. Les interrogations et les procès verbaux sont en arabe, sans traducteurs. Dans la majorité des cas, ils nous ont obligé à signer des pv dont nous ne connaissons pas le contenu.

Nous sommes rués de coups et dans l’impossibilité de nous exprimer ou de se défendre par le biais d’un avocat.

Ensuite nous sommes différés au tribunal devant des magistrats agressifs qui ne prennent pas la peine de nous expliquer quoi que ce soit.

Après cela, s’en suit un manège juridique, digne des pires pièces de théâtre : de lourdes condamnations, des jugements expéditifs, inexistence d’une défense, des avocats au seul but lucratif.

Beaucoup d’entre nous se sont vus condamner à de lourdes peines de prison en ayant répondu à deux questions seulement.

En ce qui concerne les conditions carcérales, ‘cauchemar’ est un bien petit mot.

Nous sommes entassés entre 20 et 30 personnes dans de petites cellules (70 cm² par personne environ). Il y règne un niveau d’insalubrité et d’hygiène exécrable : chambres infestées d’insectes et de rats ; un seul robinet pour tout usage (vaisselle, pour boire, nettoyage, toilettes intimes) ; sommeil à même le sol ; maladies récurrentes ; froid pendant l’hiver par manque de vitres et fuites d’eau du plafond.

Nous sommes dans un état de détériorations avancées aussi bien mentales que physiques. C’est un combat de tous les jours pour manger parce que la prison ne fournit que deux pains par jour et nous devons nous débrouiller avec toutes les dépenses que cela implique. Par dessus tout il y a le racket de la part des fonctionnaires et des prisonniers eux-mêmes. Nous devons payer pour tout alors qu’il n’y a rien, aucun suivi médical ou alors en faisant des pieds et des mains. Aucune assistance juridique ou adminstrative. Aucune assistance psychologique.

Chaque petite action menée est une guerre en soi où la lassitude, la fatigue, le slarmes, les crises de nerfs sont le lot quotidien.

C’est la peur au ventre que nous vivons et le suicide se trouve évoqué dans plusieurs de nos esprits.

En ce qui nous concerne tous, jamais, nous n’aurions pu nous imaginer que de telles conditions carcérales puissent exister, et encore moins au Maroc.

Maintenant, la question que l’on se pose est de savoir comment est-ce possible qu’on nous cache la vérité sur cette situation déplorable ? L’information dont nous sommes abreuvés en Europe sur le Maroc est tout autre. La justice y serait équitable, les droits de l’homme respectés, la corruption combattue.. Alors que la réalité est tout le contraire !

Comment nos élus européens ont pu nous tromper à ce point en passant tout un nombre d’accords avec le Maroc contre justement le respect des ces valeurs que sont la justice, l’état de droit et la sécurité. L’ONU elle même n’aurait-elle pas fait signer au Maroc tout un nombre de conventions nullement respectées ?

N’avions-nous pas le droit à de réelles informations de la part de nos élus, nos politiques ou encore même des médias. De quel jeu dangereux sommes-nous les victimes ou pour quels intérêts sommes-nous sacrifiés ?

A chaque personne qui lira ce courrier, politiques, journalistes, membres associatifs ou simplement citoyens européens, nous vous prions, nous vous supplions de nous aider et de nous porter secours. Le destin peut se montrer parfois de la sorte, mais nous restons avant tout des êtres humains et restons dans l’espoir d’un retour positif. Car même les diplomates présents ici restent sourds à nos appels ou sont impuissants. »

 

42 détenus ont signé avec leur Nom et prénom – Nationalité – Numéro d’écrou – Signature.

(Note de la rédaction de Free Ali : par respect pour la vie privée et pour la sécurité des détenus nous mettons ici seulement les prénoms et la nationalité)

 

Alexey – Italian resident

Adil – France

Fofana – France

Ludovic – France

Antonio – Italia

Mehdi – France

Christophe – France

Giancarlo – Italia

Djamel – France

Eric – France

Antonio – France

Kamel – France

Ouahid – Belgique

Ricardo – Espana

Stephane – France

Jamal – Nederland

Douimi – Nederland

Sylla – France

Moradbrahim – France

Nordine – France

Anthony – France

Jörg – Deutschland

Karl – Austria

Dietrich – Deutschland

Hussein – Jordan

Ricardo – Italia

Claude – France

Mohamed – Belgique

Hicham – Nederland

Jean – Greece

Michel – France

Saber – France

Oussama – France

Valentin – Roumanie

Ivan – Espana

Yousef – Australian

Göksel – Turkiye

Kasim – UAE

Omar – France

Salem – France

Nouar – Algérie


 

 

 

Un nouveau rapport choc ! Le CNDH de Mohamed VI reconnaît « la torture et les traitements cruels dans la plupart des prisons marocaines »

dans COMMUNIQUES DE PRESSE/LA PRISON AU MAROC/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS par

Photo : conférence de presse CNDH à Rabat

 

Du jamais vu. Et une gifle à tous ces fidèles défenseurs du régime marocain, qui n’arrêtent pas de nous assurer qu’au Maroc « rien n’est plus comme avant ». Le mardi 30 octobre 2012, le Conseil national des droits de l’homme (CNDH) a démontré le contraire. Lors d’une conférence de presse à Rabat il a présenté son rapport choc, intitulé : “La crise des prisons, une responsabilité partagée : 100 recommandations pour la protection des droits des détenu(e)s”.

Le Conseil national des droits de l’homme (CNDH)

Le CNDH a été créé en mars 2011 par le roi Mohamed VI lui-même. Il en a nommé tous les membres. Après les manifestations de masse du Mouvement du 20 février, qui avaient rassemblé des dizaines de milliers de personnes, réclamant le respect des droits de l’homme, sa création avait été annoncée comme « une des réformes globales menée par la monarchie », voulant éviter ainsi une révolution à la tunisienne ou à l’égyptienne. Force est de constater que, depuis lors, cette « reforme globale » de la justice ou du système carcéral n’a jamais eu lieu.

Ces derniers mois, il y a eu pas moins de trois rapports officiels sur les conditions infernales qui persistent dans les prisons marocaines, et que le nouveau rapport du CNDH ne vient que confirmer.

Des rapports successifs..

En juillet 2012, un rapport sur la prison de Oukacha (Casablanca) de la Commission de la Justice, de la législation et des droits de l’Homme du parlement marocain, dénonçait les conditions carcérales constatées lors d’une visite d’inspection à cette prison : « 4 détenus enfermés dans une espace de 2 m² », « 7.572 prisonniers pour une capacité de 5800 détenus », « manque d’infrastructure de base », « absence des “conditions de santé adéquates », « qualité de la nourriture qui laisse à désirer ». Puis, il ya eu le rapport provisoire de Juan Mendez, le Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture en septembre et en octobre 2012 (http://www.freeali.be/2012/10/17/torture-la-cooperation-judiciaire-avec-le-maroc-ne-peut-plus-continuer/). Suivi le 25 septembre d’une condamnation ferme de la pratique systématique de la torture au Maroc par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (http://www.freeali.be/2012/10/17/torture-la-cooperation-judiciaire-avec-le-maroc-ne-peut-plus-continuer/)                                          photo : Juan Mendez à la conférence de presse à Rabat

 
.. avec toujours le même constat.
 

Le rapport du CNDH se base sur des visites des membres du Conseil effectuées dans 15 établissements pénitentiaires durant la période allant du 31 janvier au 19 juin 2012. De ce rapport « un résumé exécutif du rapport sur la situation dans les prisons et des prisonniers » est disponible 1 Bien qu’il ne s ‘agit que d’un résumé de 14 pages, l’image de la situation carcérale marocaine y apparaît dans toute sa clarté. On peut y lire que le Conseil « a voulu s’arrêterde manière objective et précise, sur les violations qui pourraient porter atteinte aux droits des détenu(e)s ». Chose nouvelle : il s’agit d’exactions commises par le personnel des prisons. Donc survenues après que ces détenus ont déjà subi les interrogations par la police ou la DST : « Ces violations (dans les prisons) se manifestent par des coups portés aux moyens de bâtons et de tuyaux, la suspension sur des portes à l’aide de menottes, les coups administrés sur la plante des pieds (FALAQA), les gifles, les pincements à l’aide d’aiguilles, les brûlures, les coups de pied, le déshabillage forcé des détenus au vu et au su des autres prisonniers, les insultes et l’utilisation d’expressions malveillantes et dégradantes portant atteinte à la dignité humaine des détenus. Ces exactions ont été observées dans la plupart des prisons visitées avec une prévalence et une intensité qui diffèrent d’une prison à une autre, à l’exception des prisons d’Inezgane et de Dakhla où seuls des cas isolés ont été enregistrés. » (page 4).

On apprend aussi que dans la plupart des prisons « l’alimentation amenée par les familles est parfois refusée ou détruite (!); l’existence d’une pratique de punitions collectives; des transferts administratifs comme mesure disciplinaire… »

Le rapport insiste sur l’absence total « de procédures et de mécanismes de contrôle, d’enquêtes au sujet des plaintes déposées à l’encontre du personnel, y compris le personnel sanitaire, ou au sujet des violations relatées par la presse et les associations. Il y a la « non effectivité du contrôle judiciaire » (page 5). En un mot : l’arbitraire et l’abus du pouvoir règnent dans les prisons marocaines.

Deux (!) libérations conditionnelles en 2011

Je prends à titre d’exemple quelques chiffres et données dans le résumé qui nous donnent une idée de la situation des prisons marocaines : « le pourcentage de détenus incarcérés pour trafic et/ou consommation de drogues s’élève à 37,25 % du nombre total de détenus ». C’est-à-dire que presque 1 sur 2 détenus est en prison pour des affaires de drogues. Dans les recommandations du Conseil, on peut lire qu’on doit « mettre à la disposition des détenus suffisamment de couvertures, de matelas et de vêtements » et qu’il faut « la distribution juste et équitable des couvertures à l’ensemble des détenu(e)s sans exception. » (page 10). Ce qui veut dire qu’il y a des détenu(e)s qui n’en reçoivent tout simplement pas. A signaler aussi : la nourriture qui est insuffisante, pas de qualité ou trop chère dans les cantines; les soins médicaux inexistants ou insuffisants. Aussi faut-il, dit le rapport : « équiper les parloirs de toutes les prisons en chaises et tables en vue d’améliorer les conditions d’accueil des familles. » (page 10). L’image humiliant de familles assises par terre n’a pas échappé au Conseil.

Et puis, il y a la surpopulation carcérale dramatique qui, selon le Conseil : « contribue à la survenance des violations graves qui touchent essentiellement les prestations, la santé, l’hygiène, l’alimentation et la sécurité d’un côté et la réhabilitation des détenus d’un autre ». (page 7).

Pour le Conseil les raisons de la surpopulation sont les suivantes : « Le surpeuplement est dû en grande partie à la détention provisoire qui concerne 80% des détenus, au retard enregistré dans le jugement des affaires, à la non-application de la liberté conditionnelle et à l’absence de normes objectives dans la procédure de Grâce ». En langage normal, on peut dire qu’au Maroc la prison est utilisée pour terroriser les pauvres et tous ceux qui dérangent. On peut vous mettre en prison à tout moment et pour tout en n’importe quoi. Si vous avez de la chance, vous bénéficierez d’une peine avec sursis ou un non lieu ou serez reconnu innocents, à moins de bénéficier d’une Grâce Royale, accordée de manière aussi arbitraire que les arrestations. « Chaque année des milliers (!) de personnes incarcérées bénéficient d’un non-lieu, sont acquittées ou condamnées à des peines avec sursis » (page 11). S’ajoute à cela, la non-application de la libération conditionnelle, pourtant prévue par la loi. Ainsi, on ne compte que « deux libérations conditionnelles en 2011 ». (page 4) La libération conditionnelle « est refusée à la majorité des demandes formulées. » Pourtant, parmi ceux qui auraient pu en bénéficier en 2011, se trouvaient « 17939 détenus qui ont purgé les deux-tiers de leur peine, les personnes âgées, les 9228 condamné(e)s à moins de six mois et les personnes atteintes de maladies chroniques » (page 11)

les femmes détenues et leurs enfants.

Les femmes détenues : « .. pâtissent davantage… de traitements cruels et comportements dégradants (insultes, humiliations), aussi bien dans les postes de police qu’en prison .» (page 6). Le Conseil constate « (…) l’exiguïté de l’espace », réservé à ces femmes dans « plusieurs prisons, l’absence de crèches et de moyens de divertissement pour ces enfants … Dans les cas où les crèches existent, elles ne sont pas équipées. A l’expiration du délai, qui leur est accordé pour garder leurs enfants, et en l’absence des proches ou devant leur refus de les prendre en charge, les détenues sont contraintes de les abandonner à des tiers qui les exploitent dans certains cas dans la mendicité ou les placent dans des orphelinats ». « Les détenues incarcérées pour des affaires de moeurs sont particulièrement visées par certaines surveillantes ». (page 6)

Les mineurs.

Au Maroc on peut être mis en prison à partir de 12 ans. Le Conseil propose d’élever cet age à 15 ans. Et de commencer à prendre des mesures pour remédier à : “la non existence d’une police des mineurs et de lieux de garde à vue ad hoc, la non existence de substituts du procureur du Roi spécialisés dans la justice des mineurs, le manque de moyens humains et matériels à même de garantir qu’aucun préjudice ne soit causé aux mineurs en garde à vue ou la non information des parents dans certains cas des dispositions prises.

100 recommandations, mais aucune sanction.

Le rapport dénonce aussi le racisme et l’isolement total dont sont victimes les détenus étrangers de la part des autres détenus et du personnel « à cause de leur couleur ». Souvent personne n’est mise au courant de leur présence en prison.

Mais après tout cela, on se demande à quoi va servir ce rapport ? Quel sera la suite ? Bien qu’il ose dénoncer des situations accablantes dans le monde carcéral, il y a raison d’être particulièrement méfiant par rapport à la suite de ce rapport du CNDH. S’agit-il d’une nouvelle manoeuvre du régime pour prouver à l’opinion publique et internationale « qu’il y a un esprit d’ouverture  au Maroc», que le Maroc « travaille au changement positif », « qu’il est en train de développer une culture de respect des droits de l’homme en vue de l’élimination de la torture dans un futur proche» ? Bref, ce rapport sera -t-il l’occasion pour répéter les formules et les promesses qu’on entend depuis trop longtemps? Et qui pourraient ouvrir au Maroc la porte au Comité des droits de l’homme de l’ONU pour y occuper un siège permanent, que le Maroc veut obtenir à tout prix.

Le rapport fait état de tout…

Sauf des prisonniers politiques et de leur torture systématique, surtout quand il s’agit de « terrorisme » et de la « sécurité nationale ». Comment ne pas mentionner l’état dans lequel ces détenus, comme Ali Aarrass et tant d’autres, arrivent en prison, après leur passage par les mains de la DST et la brigade BNPJ ? Comment nier qu’il n’y a aucune reconnaissance de ces faits, pas de suite aux plaintes des torturés, pas d’examens médicaux impartiaux et objectifs.., comme le dit Juan Mendez ?

Le rapport parle du « personnel » dans les prisons, responsable pour les tortures. Une demande de démission immédiate et de punition par la justice de ses auteurs ne se retrouve pas parmi les 100 recommandations. Le rapport évite aussi soigneusement de citer ne fût-ce qu’un des responsables au plus haut niveau, qui portent pourtant la responsabilité finale pour la torture. Or, sans nettoyer à fond le sommet de l’appareil de l’état, toute idée de changement restera une illusion.

Le Conseil se limite dans sa « conclusion générale » à la nécessité « d’accélérer le processus de ratification du protocole facultatif à la Convention internationale contre la torture », «de la mise sur pied d’un mécanisme national et indépendant pour la prévention de la torture », et « de l’élaboration un plan d’action pour l’éradication de la torture ». Mais la torture n’est-elle pas déjà considérée comme un crime dans la nouvelle constitution marocaine sans que cela a changé quoi que ce soit?

Quand on fait 100 recommandations, c’est souvent pour noyer le poisson. Donnez-nous cinq recommandations et surtout cinq mesures concrètes qui visent l’essentiel, au lieu de 100 qui parlent de tout et de rien, et qui permettront de dire, en 2013, qu’on a quand même obtenu quelque chose (une crèche par ici, un matelas par là), sans toucher au coeur du problème. Réclamer la punition des responsables serait un signe clair. Exiger la libération immédiate des prisonniers politiques et de toutes les victimes de la torture, avant et pendant leur incarcération, en serait un autre.

Luk Vervaet.

1http://www.lesechos.ma/index.php?option=com_content&view=article&id=26889:rapport-cndh-la-crise-des-prisons&catid=22:documents-utiles

APPEL ! Ce dimanche 11 novembre à 15h au Botanique le documentaire « Ali Aarrass, pour l’exemple » + débat (Situation du dossier Ali Aarrass, des droits de l’Homme au Maroc, la question de la double nationalité…)
Dans le cadre du Festival du Cinéma Méditerrannéen.
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