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Ali Aarrass, invité chez Amnesty International Belgique, et au premier congrès du N.A.R. (National Assembly of Rif)

dans ACTIONS/DANS LA PRESSE/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS/TORTURE par


SOURCE AI Belgique

Le 2 avril 2020, Ali Aarrass a été libéré de la prison de Tiflet au Maroc, après 12 années de détention. Ce Belgo-Marocain avait été arrêté par la police espagnole en 2008, suspecté de trafic d’armes pour un réseau terroriste. Une solide enquête de l’éminent juge Baltasar Garzón avait abouti à un non-lieu, faute de la moindre preuve. Malgré cela, et contre l’avis des Nations unies (ONU), l’Espagne a accepté en 2020 la demande d’extradition d’Ali Aarrass vers le Maroc. Cela a marqué le début de dix ans d’un véritable enfer. À son arrivée, Ali a été torturé sans relâche pendant 12 jours. Il a ensuite vécu l’isolement parfois total, les mauvais traitements, les humiliations. Mais cela ne l’a jamais fait se taire, au contraire.

Ali Aarrass réside aujourd’hui en Belgique, où il essaie de se reconstruire, mais aussi d’obtenir justice. Nous l’avons rencontré dans les bureaux de la section belge francophone d’Amnesty International, qui s’est mobilisée pendant des années en sa faveur.

Qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui à témoigner des violences et atrocités commises dans les prisons marocaines ?

C’est mon combat. Parler de ce qui m’est arrivé m’aide à faire face, mais je témoigne surtout pour soutenir les personnes qui sont encore enfermées là-bas. Aujourd’hui, être libre est une raison de plus de ne pas rester dans mon coin, afin que ces tortionnaires soient punis pour leurs crimes. J’ai survécu à ces atrocités, ce n’est pas pour me taire.

Lors de votre détention, avez-vous reçu le soutien d’autres détenus ?

Il est vrai que comme je tentais de défendre la cause des prisonniers, une certaine forme d’empathie et de solidarité pouvait se créer envers moi. Cependant, j’essayais de ne pas m’approcher d’eux, car ceux qui entraient en contact avec moi étaient transférés dans d’autres quartiers ou dans d’autres prisons loin de leur famille.

Je me suis demandé pourquoi il ne me transférait pas moi plutôt qu’eux. En fait, les autorités voulaient me maintenir à Rabat pour que les ONG organisations non gouvernementales, NDLR], ou d’autres organisations, puissent me rendre visite facilement et constater les bonnes conditions de détention. Bien sûr, ces visites se faisaient après un grand nettoyage. C’était une mascarade. On ne pouvait même pas se retrouver seul avec les personnes qui examinaient les conditions de détention, il y avait toujours un responsable de la prison pas loin.

Souvent, ces visites étaient faites par le Conseil national des droits de l’homme (CNDH) marocain, qui dépend entièrement de l’État. Les rapports que fait cette institution ne sont pas fiables.

Ils envoyaient des médecins aussi ?

Oui, mais là aussi, j’ai appris à rester méfiant. Par exemple, lorsque le psychiatre vous demandait si vous dormiez bien, c’était un piège qu’il vous tendait pour vous prescrire un tranquillisant et vous transformer en une sorte de zombie. Une fois, j’ai pris un des médicaments que l’on m’a prescrit et je ne me suis pas reconnu. Il ne faut pas montrer de points faibles en prison, sinon ils s’en servent contre vous.

Aussi, quand vous demandez un médecin, il n’y en a jamais de disponible. Il y a des morts dans ces prisons. Je me souviens d’un prisonnier qui n’a pas eu accès à des soins. Il est mort dans sa cellule. Les autorités ont emmené son corps à l’hôpital et ont fait dire aux médecins qu’il était décédé là-bas. Selon les chiffres officiels, il n’y a donc aucun mort dans les prisons marocaines.

Aviez-vous des contacts avec votre famille et votre avocat ?

Je n’ai eu aucun contact avec eux pendant les 5 premiers mois au Maroc, j’étais à l’isolement total. Je n’avais même pas le droit à des douches, pas le droit de téléphoner à ma famille, pas le droit de sortir au préau … j’avais juste le droit à de la nourriture immangeable. La soupe servie la veille se transformait en un bloc compact le lendemain. Il y avait des insectes dans les lentilles. La faim était toujours présente. La nuit, les lumières pouvaient être allumées ou éteintes en fonction de l’envie des gardes. Tout devenait un moyen de torture dans le but de nous faire perdre la raison.

Les prisonniers les plus dangereux, de « catégorie A », dont je faisais partie, devaient être coupés du monde, personne ne devait me croiser ou m’approcher. C’était un isolement très dur, j’ai été le seul à occuper une cellule dans un couloir qui en comptait 38. Elles avaient été vidées pour que je me retrouve totalement seul. À cette époque, les printemps arabes étaient en cours et même ça, je ne l’ai su que bien plus tard. J’ai même perdu la notion du temps.

Comment s’est passé votre retour en Belgique ?

Je suis sorti de prison en plein confinement à cause de la pandémie. Quand les portes de la prison se sont ouvertes, j’ai fait face à un horizon que je n’avais pas vu depuis des années. Ma famille est venue me chercher pour aller à l’ambassade. J’ai demandé à pouvoir rentrer en Belgique, mais les autorités belges m’ont répondu qu’ils ne pouvaient rien faire pour moi, que les frontières étaient fermées. Il y a bien eu des vols de rapatriement mais ils ne m’ont jamais pris.

C’est une famille belge qui réside à Rabat, que je remercie énormément, qui m’a accueilli pendant les trois mois de confinement au Maroc. La maison et la famille étaient sous surveillance de la police à cause de moi. Je n’avais pas envie qu’ils aient des problèmes avec les autorités ou le voisinage.

Aujourd’hui je cherche du travail. Je suis ancien commercial, j’ai toujours été indépendant et je suis maintenant au CPAS. Les difficultés continuent même à l’extérieur de la prison.

Vous êtes suivi médicalement ?

J’ai vu plusieurs spécialistes depuis mon retour. J’essaie aujourd’hui de respirer et de vivre mais c’est impossible d’oublier. C’est en rentrant à la maison le soir que tout cela me revient. J’essaie de ne pas tomber dans cette ambiance-là. Mais c’est plus fort que moi, je l’ai vécu, le trauma est là. J’ai une fille que je n’ai pas vu grandir pendant 12 ans … ça, c’est irréparable.

Vous menez un combat pour obtenir justice devant les tribunaux également. Quelles sont les procédures en cours ?

Le Maroc a toujours nié et il continuera afin de protéger son image. Ils n’admettront jamais qu’ils aient pu se tromper sur un prisonnier ou une accusation de terrorisme. Ils ont dû me torturer pour que je signe un PV et m’arracher de faux aveux. Au Maroc, toutes les personnes qui se font arrêter pour terrorisme sont d’office condamnés. Ce qui leur permet de paraitre crédible dans leur lutte contre le terrorisme sur la scène internationale.

Une action est en cours à la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). Les autorités marocaines se défendent avec de faux témoignages et en me faisant passer pour un menteur. Ils ne veulent pas reconnaître leur erreur. Erreur dont je porte les traces physiques et psychologiques dans ma chair.

Vous intentez également une action contre l’État Espagnol ?

L’Espagne a été condamnée récemment pour mon extradition vers le Maroc. Extradition qui s’est faite malgré le non-lieu de l’affaire qui a prouvé mon innocence, et malgré les recommandations d’Amnesty International et des Nations Unies qui s’inquiétaient des risques de torture que j’encourais. Mais ce procès est toujours en cours puisque l’État a fait appel.

La Belgique avait refusé l’assistance consulaire pendant des années. A-t-elle, aujourd’hui, fait un pas vers vous ?

Non, je ne suis pas en contact avec les autorités. Personne n’a sonné à ma porte pour me demander des nouvelles. Je n’attends de toute façon rien de l’État. Je suis déçu que la Belgique n’ait rien fait et ne vienne pas au secours d’un citoyen. Depuis le mois de janvier, nous avons obtenu gain de cause pour les binationaux. Maintenant, l’État doit leur garantir l’assistance consulaire.

En détention, receviez-vous les messages envoyés par les militant·e·s d’Amnesty ?

Oui, il fallait rester fort et c’est grâce à vous que j’y suis arrivé. Votre soutien m’a permis de tenir. Vos voix faisaient vibrer ma cellule. Ma sœur me rapportait au téléphone vos messages réconfortants, je ressentais alors comme une lumière qui me donnait le courage de continuer.

D’autres prisonniers sont abandonnés, vulnérables, dont beaucoup d’innocents, qui rentrent dans leur coquille. Je les comprends. Ça n’était pas mon cas. Je devais absolument, malgré ces conditions, lever le poing et dénoncer les atrocités qu’ils nous faisaient. Je vous remercie du fond du cœur.

 

Au N.A.R. National Assembly of Rif 

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La VOZ de ASTURIAS : Historia de ALI (un articulo de opinion de Gonzolo Olmos, 1/06/2021)

dans DANS LA PRESSE/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS/TORTURE par

SOURCE

La televisión belga RTBF ha producido un valiente documental sobre la historia de Ali Aarrass, en su colección Témoignages (Testimonios), que pueden ver en la web y redes de esta cadena y que bien merece la atención del público español.

Porque la desdichada peripecia de Ali tiene mucho que ver con las responsabilidades e incumplimientos de España respecto de las obligaciones internacionales adquiridas en materia de derechos civiles, sumadas a las de Bélgica y Marruecos, el Estado ejecutor de las graves violaciones de derechos humanos padecidas por Ali, aún sin verdadera investigación oficial ni depuración de responsabilidades.

Aunque originariamente de nacionalidad marroquí, Ali es en buena medida melillense por haber vivido allí en su infancia, y belga por los 28 años transcurridos posteriormente en el país europeo, adquiriendo dicha nacionalidad en 1989, incluso prestando el servicio militar y desarrollando allí una buena parte de su vida. De vuelta a sus raíces melillenses en 2005, comenzó su pesadilla, al aparecer su nombre en investigaciones sobre grupos terroristas islamistas. No se formuló ninguna clase de acusación frente a él en España, pero, en 2008, fue detenido a instancias de las autoridades marroquíes, y extraditado al país vecino. Se autorizó la entrega con base en la sacrosanta cooperación antiterrorista, pese a la ausencia de evidencias sólidas en contra de Ali y a despecho de las advertencias del Comité de Derechos Humanos de la Organización de las Naciones Unidas (ONU), que había manifestado que corría riesgo de sufrir tortura en Marruecos. Ali Aarrass denunció que había sido sometido a torturas u otros malos tratos bajo custodia entre el 14 y el 24 de diciembre de 2010, hechos que volvieron a producirse posteriormente ya en prisión. Las autoridades marroquíes nunca investigaron adecuadamente sus denuncias de palizas, descargas, violación con objetos, ahogamiento, mantenimiento colgado de las muñecas durante horas, etc. Un vídeo grabado clandestinamente en prisión muestra, de hecho, las reveladoras marcas de la brutalidad en el cuerpo de Ali. El 19 de noviembre de 2011, sin más base que unas declaraciones obtenidas mediante tortura, fue declarado culpable de utilización ilegal de armas y de formar parte de un grupo que pretendía llevar a cabo actos de terrorismo y condenado a 15 años de prisión, que se redujeron a 12 tras los sucesivos recursos. En 2012, el relator de la ONU para la tortura, Juan Méndez, que tuvo ocasión de conocer las condiciones de encarcelamiento de Ali Aarrass y que pudo promover su examen por un médico forense independiente, dio pleno crédito a las denuncias de torturas, y así lo puso de manifiesto a las autoridades marroquíes, para que cesase cualquier práctica de esta naturaleza y se investigase lo sucedido.

En 2013, el Grupo de Trabajo de la ONU sobre la Detención Arbitraria pidió a las autoridades marroquíes que dejaran a Ali Aarrass en libertad de inmediato, tras concluir que había sido declarado culpable sin más fundamento que confesiones obtenidas por medio de tortura. En 2014, el Comité de la ONU contra la Tortura concluyó igualmente que la confesión había sido decisiva para declararlo culpable sin que se llevaran a cabo investigaciones adecuadas de la tortura que había denunciado.

Paralelamente, el Comité de Derechos Humanos de la ONU decidió, en julio de 2014, que España había incumplido las obligaciones contraídas en virtud del Pacto Internacional de Derechos Civiles y Políticos al extraditar a Ali Aarrass a Marruecos. Asimismo, pidió a España que concediera a Ali Aarrass la debida indemnización y que tomara todas las medidas posibles para garantizar, en colaboración con las autoridades marroquíes, que su detención en Marruecos se ajustaba al derecho y las normas internacionales.

En 2015, el Comité contra la Tortura expresó también su preocupación por su extradición en 2010 y pidió a España que investigase sus denuncias de tortura. A pesar de numerosas decisiones de la ONU que confirman las violaciones de derechos humanos que Ali Aarrass sufrió, hasta la fecha las autoridades marroquíes y españolas no le han ofrecido resarcimiento alguno. Y tampoco lo han hecho las autoridades belgas, pese a su inacción en la protección de un nacional de dicho país. Ni las repetidas medidas de protesta de Ali ni las campañas internacionales en su favor consiguieron su liberación anticipada, que no se produjo hasta abril de 2020. Ali, finalmente, pudo viajar a Bélgica unas semanas después, para comenzar su recuperación y seguir su lucha por la verdad y la justicia.

Quienes, a través de Amnistía Internacional en Asturias, que ha trabajado durante años en el caso de Ali, hemos conocido de su viva voz la pesadilla a la que ha sobrevivido, sabemos que, pese al tormento infligido y los años robados, no parará hasta que se ventilen todas las responsabilidades por los crímenes de los que ha sido víctima. Ali quiere, y tiene derecho a ello, que se reconozca cómo el zarpazo de un Estado autoritario (Marruecos), donde la represión es constante (frente a los activistas sociales rifeños o los líderes saharauis en los territorios ocupados, por ejemplo), la  práctica de la tortura es sistemática y la falta de garantías en los procedimientos judiciales es común, contó, al pronunciarse las palabras mágicas («lucha contra el terrorismo», que justifica todo y evita cualquier pregunta, al parecer), con la cooperación de España al entregarle pese a la repetida advertencia de que sucedería lo que luego acaeció (torturas y condena sin fundamento fáctico) y la complacencia de la propia Bélgica que, en la práctica, lo consideró un ciudadano de segunda indigno de su protección. La duda no es, por lo tanto, si el horror de la violencia estatal marroquí y la inicua colaboración activa u omisiva de las autoridades españolas y belgas detendrán los esfuerzos de Ali para obligar a que se rindan cuentas. La cuestión es si la sociedad civil de estos países será capaz de decirle a los aparatos de poder estatal que permitir o facilitar directa o indirectamente la tortura, en cualquiera de sus formas, es totalmente inaceptable, deslegitima el poder público y lo rebaja a la condición criminal de los autores, si no se depuran responsabilidades y se repara, en aquello que sea posible (porque ese dolor jamás se borra), el enorme daño causado.

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