4 novembre 2015 : La lettre d’Ali Aarrass et le message de sa soeur Farida

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lettre d'Ali Aarrass 4 novembreTrès chers amis,

Pour commencer, je vous souhaite à tous le grand Salam (paix)

Ce mercredi 4 novembre 2015, nous en sommes à la 3 ème visite de la semaine rendue à Ali Aarrass et nous n’avons pas pu rester plus qu’une toute petite demi heure car il n’était vraiment pas bien. Depuis hier son estomac rejetait les tisanes sucrées qu’il essayait d’avaler.
Son teint était on ne peut plus pâle, des grandes cernes et si maigri que l’impression d’être face à un cadavre nous a laissées ma fille et moi sans voix.
Il dit avoir passé une très mauvaise nuit, il s’est vomi dessus alors qu’il dormait, du liquide en fait les quelques petites gorgées d’eau qu’il avait réussi à garder en fin de soirée. Mais il a senti qu’il partait et à ce moment précis s’est ressaisi suffisamment que pour alerter quelqu’un à l’extérieur, en faisant du bruit… Les codétenus ont entendu le bruit et à leur tour ont crié et alerté les gardes pour qu’on vienne à sa cellule.
A leur arrivée, Ali n’avait plus de force que pour prononcer tant bien que mal « médecin » « médecin ».

Le médecin est venu l’examiner, et Ali a compris qu’il touchait le fond. Qu’il allait y rester pour de bon s’il ne décidait pas de mettre un terme à la grève….

A notre arrivée en prison, il nous attendait là, sur une chaise roulante les jambes toutes maigres tendues en avant, très triste… Il nous parlait de son sentiment d’échec de cette grève de la faim, parce qu’il n’a rien obtenu au sujet de ses revendications. Même pas une promesse… après 72 jours de privation de nourriture, il pensait que les autorités feraient un effort.

C’est là que je suis intervenue et l’ai remercié en tenant sa tête entre mes mains, en pleurs….

Je lui ai dit que ce n’était pas du tout un échec, loin de là.
Qu’en Belgique grâce à sa grève de la faim, aux cris lancés de partout réclamant que justice lui soit rendue, de tas de personnes ont pris la peine de s’informer quant à son cas, qu’elles en sont maintenant convaincues de son innocence. Que d’autres qui étaient convaincus mais pas assez, ont fini par carrément rejoindre le Comité de soutien FreeAli et qu’ils militent actuellement à nos cotés. Que son nom a résonné un peu partout et qu’il a secoué pas mal de personnes.

Voyant son air si attristé, j’ai ajouté que nous allions mettre les bouchés doubles. Que s’il suspend sa grève, nous continuerons à lutter pour que justice vienne. Que ce qu’il a fait est un exploit et qu’il n’est pas surhumain.
Que nous sommes là, pour faire suivre et que jamais nous ne l’abandonnerons.

Toujours le regard vide, la voix toute affaiblie, il m’a demandé à ce moment d’exiger du papier et un stylo au gardien.

Il m’a dit de formuler la lettre selon ses souhaits, je l’ai écouté et écrit ce qu’il voulait. Il y a apposé sa signature, et nous a demandé de partir parce qu’il n’avait plus aucune force.

J’ai insisté auprès d’un garde pour qu’il soit suivi médicalement, car il ne tiendrait pas sinon. Il m’a fait comprendre qu’il en serait ainsi…

Ali a tenu à ce qu’on précise bien qu’il s’agit d’une « suspension ». Il est très très déçu de la non réaction des autorités, mais dit être très fier d’avoir eu droit à toute cette mobilisation.

Je connais tellement bien mon frère, que sa déception se lit à travers son regard. J’espère l’avoir convaincu qu’il a suffisamment fait et que cela a vraiment servi à quelque chose.
A mon/notre tour de ne pas le décevoir.
Je suis impatiente d’être en Belgique pour relancer des actions de sensibilisation, des actions d’interpellations.

Il est hors de question qu’il pense qu’il a fait tout ça pour rien, j’y veillerai avec votre aide bien sur.

Un tout grand merci à tous.

C’est étrange à quel point il est tout aussi dur de le voir mener une grève de la faim, et de lire cette grande déception dans son visage.

Farida Aarrass

Ali ne sera pas oublié, je tiens mes promesses !

Photo : une copie de la lettre d’Ali Aarrass.

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