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ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L’HOMME / FOR HUMAN RIGHTS - page 11

Affaire Belliraj : Human Rights Watch réclame la libération des 17 détenus toujours en prison (Rapport juin 2013)

dans ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS par

HRW rapport juin 2013 frontpagepar Luk Vervaet

 Les rapports sur la torture, infligée aux inculpés dans les procès politiques au Maroc, se suivent et s’entassent.

En 2012 Juan Mendez, le rapporteur spécial de l’ONU contre la torture, a fait son rapport sur la torture au Maroc et sur le cas d’Ali Aarrass en particulier. Juan Mendez prouve que des traces physiques et psychologiques liées à la torture ont bien été constatées . En avril 2013, l’organisation Alkarama adresse le même message au Comité contre la torture de l’ONU. Première européenne en mai 2013, quand deux détenus franco-marocains, Adil Lamtalsi et Mostafa Naïm, sont transférés vers une prison en France pour y finir leur peine. Devant la justice française, les deux détenus portent plainte contre le Maroc pour avoir subi dans ce pays une arrestation sans mandat, des aveux extorqués sous la torture, suivis d’une condamnation. 

Juin 2013. Un rapport de Human Rights Watch (HRW) met à nouveau en cause les tortionnaires au Maroc. Depuis 30 ans, Human Rights Watch (HRW) est parmi les organisations mondialement reconnue pour la défense des droits de l’homme. Sous le titre « Tu signes ici, c’est tout  : Procès injustes au Maroc fondés sur des aveux à la police » (un rapport de 137 pages), HRW demande au gouvernement marocain la libération immédiate des 17 prisonniers (des 35 condamnés) toujours en prison dans l’affaire Belliraj ou leur libération en attendant un procès équitable.Enfant de Belliraj 26 juin

Le Comité des familles des détenus européens au Maroc, dont font partie les familles d’Abdelkader Belliraj, d’Abdellatif Bekhti et d’Ali Aarrass, se réjouit de cette demande de HRW, qui n’a jamais été formulée si explicitement.

HRW logoLe rapport dit ceci :

« En ce qui concerne l’affaire de Gdeim Izik, dans laquelle 21 des 25 accusés sont en prison, et l’affaire Belliraj, où 17 des 35 accusés sont en prison, les autorités marocaines devraient:

Libérer les accusés encore emprisonnés ou bien leur accorder un nouveau procès qui soit équitable. Pour les accusés de Gdeim Izik, tout nouveau procès devra avoir lieu devant un tribunal civil.

• Si les affaires sont rejugées, la présomption devra être que tous les accusés seront libres jusqu’à leur procès. Tout accusé que le ministère public voudrait placer en détention devrait avoir droit à une audition rapide devant un juge pour que ce dernier se prononce sur la légalité de sa détention, en partant d’une présomption de liberté. Toute décision judiciaire de détenir l’accusé dans l’attente de son procès devrait être fondée sur des motifs valables, par exemple s’il est dangereux ou s’il risque de récidiver, de falsifier les preuves à charge ou de prendre la fuite.Calicot Belliraj Bekhti

• Quand les accusés seront rejugés, le tribunal devra étudier leurs allégations de torture et garantir, conformément au droit international et marocain, qu’aucune déclaration obtenue par la violence ou sous la contrainte ne soit admise comme preuve. Le tribunal devrait mener ces enquêtes même si les traces physiques de torture se sont déjà probablement effacées. Ces investigations devraient respecter les critères internationaux d’enquête sur les plaintes individuelles de torture, notamment ceux du Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« protocole d’Istanbul »).

• Si le tribunal décide d’admettre comme preuve une déposition de police dont l’accusé affirme qu’elle a été extorquée sous la torture, il devrait expliquer dans son jugement écrit pourquoi il a décidé que ces allégations de torture ou de contrainte abusive n’étaient pas crédibles. »

(page 10 du résumé du rapport en français). 

 Une analyse de six procès politiques. HRW rapport juin 2013 long

 HRW arrive à cette conclusion après son analyse de « six affaires politiquement sensibles, jugées entre 2008 et 2013, dont l’affaire Zakaria Moumni, dans lesquelles les tribunaux ont violé le droit des accusés à un procès équitable ». (pg 2 du résumé en français). Il s’agit des affaires Zakaria Moumni ; Belliraj ; Gdeim Izik ; Seddik Kebbouri ; les jeunes du Mouvement du 20 Février à Sidi el-Bernoussi, Casablanca  et l’affaire des sept activistes sarahouis.

calicot Beliraj 26 juin wife and sister of BekhtiHRW dénonce que les 84 personnes inculpées dans ces six affaires ont été condamnées sur base des aveux « extorqués sous la torture ou par d’autres méthodes illégales » ou sur base de « témoignages, sans que les témoins devaient témoigner au tribunal ». HRW constate que nombre d’inculpés dans l’affaire Belliraj ont été enlevé et ont disparu pendant une période qui a été beaucoup plus longue que la période légale de garde à vue prévue par la loi, et sans aucun contact avec un avocat ou un membre de leur famille. HRW constate que les tribunaux « n’ont pas fait d’effort significatif pour vérifier les plaintes sur la torture » et ne se basent que sur « les déclarations à la police qui les incriminent ». Et ce malgré le fait que les accusés ont affirmé que « ces déclarations leur avaient été extorquées ».

la fille d'Abdellatif Bekhti 26 juin La complicité belge dans le procès Belliraj

Ce rapport constitue un nouveau coup dur, non seulement pour la justice et la police secrète marocaine, mais aussi pour l’état belge qui a activement contribué au procès Belliraj.

La Belgique a transmis des dossiers judiciaires à la justice marocaine pour le procès Belliraj, malgré la mise en garde du sénateur CD&V Vandenberghe, qui a interpellé le ministre de la Justice, le 4 mars 2010, sur cette collaboration. Cette mise en garde n’a en rien changé l’attitude du gouvernement belge.

Trois mois plus tard, le 29 novembre 2010, le ministre Van Ackere va encore plus loin. Dans la Chambre, il se vante que la Belgique, par l’intermédiaire du ministre de la justice De Clerck, a extradé « un ressortissant algérien vers le Maroc dans le cadre du procès Belliraj début 2010 ». Il s’agit de Bin Rabeh Benjettou, qui sera sauvagement torturé une fois arrivé au Maroc et qui sera condamné par la suite à dix ans de prison.

A l’intention des « gouvernements et institutions qui fournissent une aide au Maroc », dont la Belgique et d’autres pays européens, HRW recommande en matière de justice : « Dans le cadre des programmes d’aide à la réforme de la justice et à la mise en place d’un État de droit, encourager le Maroc à mettre en œuvre les recommandations énumérées ci-dessus, surtout celles qui veulent pousser les juges à :

• examiner de façon plus critique la valeur, comme preuve, des procès-verbaux préparés par la police, quand les accusés récusent leur contenu;

• concevoir et suivre des méthodes pour explorer plus en détail les allégations de torture ou de mauvais traitements, quelle que soit l’étape des procédures où elles ont été émises;

• imposer des limites légales à la durée de la détention provisoire, non seulement pendant la phase de l’enquête judiciaire mais aussi quand un procès ne parvient pas à démarrer ou à être mené à bien dans un délai raisonnable, et garantir un réexamen judiciaire régulier et approfondi des ordres de détention provisoire. »

(page 10/11 du résumé du rapport en français).

Ces recommandations s’adressent directement à Madame Turtelboom. La nouvelle ministre de la justice belge avait déclaré fièrement dans la Commission de la justice de la Chambre du 2 mai 2012 : « Après la France, la Belgique est le premier partenaire du Maroc en matière de collaboration judiciaire… J’ai abordé, avec mon homologue marocain, des matières comme le transfèrement des détenus marocains condamnés, la collaboration en matière de d’affaires pénales et civiles, l’échange d’informations liées à la problématique de l’identification et aux rapts internationaux d’enfants ». Comme vous avez remarqué : aucun des éléments mentionnés par HRW se retrouve dans le palmares de madame Turtelboom. Elle se limite à une collaboration sécuritaire, technique et administrative, sans se soucier ni d’enlèvements ni de tortures, même de ses propres citoyens belges.

Le ministère des affaires étrangères de Monsieur Reynders, lui, continue à se cacher derrière « la non-ingérence » de la Belgique dans les affaires de l’état de l’autre nationalité des Belges qui ont la double nationalité, pour justifier son inaction vis-à-vis du sort des torturés belgo-marocains au Maroc. Il doit se réaliser qu’à travers les différents rapports de cette dernière année la collaboration de la Belgique dans les pratiques d’extradition illégale, d’enlèvements, de torture et de procès iniques au Maroc constitue d’or et déjà un fait indéniable. En ce qui concerne Ali Aarrass et les autres, nous lui rappelons ce que 47 personnalités britanniques lui ont écrit il y a quelques semaines : « L’interdiction de la torture est ius cogens. Cela veut dire que c’est une norme impérative du droit international. Nous croyons qu’il doit primer. La nature extrêmement grave de ce que M. Aarrass a subi, le harcèlement continu et des traitements inhumains dont il est victime jusqu’à aujourd’hui et qui ont été notés par le Rapporteur spécial de l’ONU, rendent la non-intervention par le gouvernement belge extrèmement inquiétante ». 

 Bin Rabeh Benjettou et Ali AarrassFarida Elena 26 juin

 Nous publions ci-dessus la liste de HRW des 35 inculpés dans le procès Belliraj et leur peine.

Pour 18 de ces condamnés leur nom est suivi par la date de leur libération après avoir purgé leur peine, ou la date du pardon du roi.

Ni le nom de l’extradé algérien par la Belgique, Bin Rabeh Benjettou, ni celui d’Ali Aarrass se trouvent sur la liste des 35. Il est vrai que ni l’un ni l’autre figuraient dans le procès de masse contre le soi-disant réseau Belliraj (les 35 personnes arrêtées au Maroc en 2008 et jugées en 2009). Mais ils font pourtant partie du même dossier. Bin Rabeh Benjettou a seulement été extradé par la Belgique en 2010. Ali Aarrass fût bien arrêté au même moment que les 35 autres, en 2008, mais en dehors du Maroc, suite à un mandat d’arrêt international du Maroc. Il fût le dernier à être condamné dans cette affaire (à 15 ans de prison , diminué en appel à 12 ans), après son extradition illégale par l’Espagne et sa torture au Maroc.

Rachida speaks 26 juinLe cas d’Ali Aarrass est d’ailleurs une illustration de plus de ce qu’affirme le rapport de HRW. La justice espagnole a examiné l’affaire Ali Aarrass de fond en comble. Elle est arrivée à la conclusion qu’il n’ y avait rien contre Ali Aarrass. Malgré cela il n’a pas été libéré, mais a été extradé au Maroc, contrairement à la demande de la Commission des droits de l’homme de l’ONU. Et là, au Maroc, après 12 jours incommunicado et de torture, l’homme qui depuis le premier jour de son arrestation jusqu’à aujourd’hui a toujours maintenu son innocence, a comparu devant le juge d’instruction avec « des aveux ». Des aveux qui n’en étaient pas, mais qui n’étaient que la copie, mot pour mot, de son inculpation par la police, dans une langue qu’il comprend ou parle à peine. Ou comment le juge d’instruction antiterroriste Chentouff et sa police arrivent à faire « des miracles » en douze jours de temps.

 Vous pouvez lire le résumé du rapport de Human Rights Watch (15 pages PDF) et/ou le rapport intégral en anglais, avec des témoignages accablants de détenus dans le procès Belliraj, via le lien de HRW

 

Appendix II: List of Defendants in « Belliraj » Case and the Sentences They Received (liste des accusés et leurs peines)

 

1. Abdelkader Belliraj, life in prison (perpétuité)

2. Abdellatif al-Bekhti, 30 years (ans)

3. Abdessamed Bennouh, 30 years

4. Jamal al-Bey, 30 years

5. Lahoussine Brigache, 30 years

6. Redouane al-Khalidi, 30 years

7. Abdallah ar-Rammache, 30 years

8. Mohamed Yousfi, 30 years

9. Mohamed Merouani, 25 years, reduced to 10 years on appeal, then pardoned April 12, 2012

10.Mustapha Mouâtassim, 25 years, reduced to 10 years on appeal, then pardoned April 12, 2012

11. Mohamed Lamine Regala, 25 years, reduced to 10 years on appeal, then pardoned April 12, 2012

12. Abadila Maelainin, 20 years, reduced to 10 years on appeal, then pardoned April 12, 2012

13. Abdelhafidh Sriti, 20 years, reduced to 10 years on appeal, then pardoned April 12, 2012

14. Abd al-Ghali Chighanou, 15 years

15. Mokhtar Lokman, 15 years

16. Abderrahim Nadhi, 10 years

17. Abderrahim Abu ar-Rakha, 10 years

18. Hassan Kalam, 8 years

19. Slah Belliraj, 8 years, reduced to 5 years on appeal, then pardoned 2012

20. Ahmed Khouchiâ, 8 years

21. Samir Lihi, 8 years

22. Mustapha at-Touhami, 8 years

23. Bouchâab Rachdi, 6 years

24. Mohamed Azzergui, 5 years (freed upon completion of sentence in February 2013)

25. Mansour Belaghdeche, 5 years (freed upon completion of sentence in February 2013)

26. Adel Benaïem, 5 years (freed upon completion of sentence in February 2013)

27. Mohamed Chaâbaoui, 5 years (freed upon completion of sentence in February 2013)

28. Jamaleddine Abdessamed, 3 years (freed, sentence completed)

29. Abdelazim at-Taqi al-Amrani, 3 years (freed, sentence completed, acquitted on re-trial after the Court of Cassation quashed his conviction)

30. Larbi Chine, 2 years (freed, sentence completed in early 2010)

31. Ibrahim Maya, 2 years (freed, sentence completed in early 2010)

32. Abdellatif Bouthrouaien, 2 years (freed, sentence completed in early 2010)

33. Hamid Najibi, 2 years (freed, sentence completed in early 2010)

34. Mohamed Abrouq, 1 year suspended sentence

35. Ali Saïdi, 1 year suspended sentence

 

EXCLUSIF ! Le rapporteur de l’ONU Juan Méndez sur le Belge Ali Aarrass (texte intégral !!)

dans DANS LA PRESSE/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS/TORTURE par

NATIONS UNIES UNITED NATIONS

HAUT COMMISSARIAT DES NATIONS UNIES OFFICE OF THE UNITED NATIONS AUX DROITS DE L’HOMME HIGH COMMISSIONER FOR HUMAN RIGHTS

PROCEDURES SPECIALES DU SPECIAL PROCEDURES OF THE

CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME HUMAN RIGHTS COUNCIL

 

Mandat du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

REFERENCE: AL G/SO 214 (53-24)

MAR 11/2012

4 décembre 2012

Excellence,

J’ai l’honneur de m’adresser à vous en ma qualité de Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants conformément à la résolution 16/23 du Conseil des droits de l’homme.

 

Dans ce contexte, je souhaiterais attirer l’attention du Gouvernement de votre Excellence sur des informations que j’ai reçues concernant des allégations portant sur des actes de torture et de mauvais traitements ayant été commis à l’encontre M. Ali Aarrass.

Les informations reçues concernent également des allégations portant sur des preuves obtenues sous la torture lors de la détention provisoire de M. Aarrass; de l’absence d’enquêtes par les autorités marocaines; de harcèlement constant; de refus d’un traitement médical approprié; et de menaces envers M. Aarrass après la visite du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants au Maroc du 15 au 22 septembre 2012.

Selon les informations reçues:

M. Aarrass, âgé de 50 ans, est un citoyen belgo-marocain, qui se trouvant actuellement en détention à la prison de Salé II au Maroc. M. Aarrass a été arrêté en Espagne le 1er avril 2008, conformément à une demande d’extradition du Maroc pour des accusations liées au terrorisme.

Le 19 novembre 2010, le Conseil des ministres espagnol a approuvé l’extradition de M. Aarrass. Le 26 novembre 2010, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies (référence 2008/2010) a demandé aux autorités espagnoles de surseoir à l’extradition de M. Aarrass. M. Aarrass a été extradé comme prévu d’Espagne vers le Maroc le 14 décembre 2010.

À son arrivée au Maroc, il est rapporté que M. Aarrass aurait été sauvagement torturé pendant 10 jours et soumis à d’autres formes de traitement cruel, inhumain et dégradant, y compris le viol, les coups et les humiliations, ainsi que le refus d’un traitement médical approprié, au cours de sa détention provisoire. Il est en outre signalé que M. Aarrass aurait avoué les accusations portées à son encontre en signant une confession écrite par les autorités en langue arabe, en dépit de sa mauvaise connaissance de cette dernière.

Le 8 février 2011, M. Aarrass, en présence d’un avocat, aurait dit au juge d’instruction que ses aveux avaient été obtenus sous la torture. Le 2 mai 2011, le conseiller juridique aurait déposé une plainte au sujet de la torture de M. Aarrass avec le ministre de la Justice et le procureur général de Rabat. Le 15 septembre 2011, le Tribunal de première instance aurait refusé d’ouvrir une enquête sur les allégations portant sur les actes de torture.

Le 29 novembre 2011, le tribunal marocain de première instance de Salé a condamné M. Aarrass à 15 ans de prison. Il est également allégué que le tribunal de première instance aurait omis de mener une enquête adéquate sur les allégations portant sur les actes de torture commis envers M. Aarrass, malgré de nombreuses demandes et malgré une plainte pénale officielle déposée par son avocat. Il est en outre allégué que l’accusation reposerait uniquement sur les aveux obtenus de M. Aarrass sous la torture, plutôt que sur les preuves objectives de la culpabilité du prévenu. Il est rapporté que M. Aarrass a fait appel de la décision et que l’État aurait procédé à l’établissement d’un rapport médico-légal concernant M.Aarrass, le 8 décembre 2011.

Il est également signalé que, selon une étude indépendante médico-légale du 13 juin 2012, le rapport médico-légal du 8 décembre 2011, et l’examen médical établi par les autorités seraient à la fois insuffisants et ne répondraient pas aux normes exigeant une diligence raisonnable, indépendante, et des enquêtes impartiales sur les allégations portant sur les actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Toutefois, le 18 avril 2012, dans le cadre de l’appel de la décision du tribunal de première instance, le procureur général de Rabat a pris la décision de ne pas enquêter sur les allégations portant sur les actes de torture.

Il est rapporté que le 2 octobre 2012, la Cour d’appel de Rabat-Salé a confirmé la condamnation de M. Aarrass, en réduisant la peine de 15 à 12 ans. Il est également allégué que la Cour d’appel n’aurait pas entendu les allégations de M. Aarrass concernant des allégations portant sur les actes de torture, et aurait omis de considérer l’irrecevabilité des aveux obtenus sous la contrainte. Il est rapporté que le juge aurait interrompu la description de M. Aarrass des actes de torture subis en disant simplement que M. Aarrass avait déjà signé des aveux.

Il est en outre signalé que la Cour d’appel n’a pas encore rendu sa décision par écrit dans le cas de M. Aarrass.

Le 20 septembre 2012, le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a rencontré M. Ali Aarrass à la prison de Salé I peu de temps avant que la Cour d’appel n’ait rendu son jugement.

Le médecin légiste indépendant qui accompagnait le Rapporteur spécial a effectué un examen physique externe et trouvé des traces de torture sur le corps de M. Aarrass. Le médecin légiste a conclu que la plupart des traces observées, bien que non diagnostiquées comme signes de torture, sont clairement compatibles avec les allégations présentées par M. Aarrass, à savoir le genre de torture et de mauvais traitements infligés, tels que brûlures occasionnées par une cigarette, pratique du «falanja » (coups assenés sur la plante des deux pieds), attachement intense puis suspension par les poignets et électrochocs aux testicules. En outre, il a constaté que la description faite par M. Aarrass des symptômes ressentis après les épisodes d’actes de torture et de mauvais traitements est totalement compatible avec les allégations et que le genre de pratiques décrites et les méthodologies qui auraient été suivis par les agents pratiquant ces actes, coïncident avec les descriptions et les allégations présentées par d’autres témoignages que le Rapporteur spécial a reçus dans d’autres lieux de détention et qui ne sont pas connus de M. Aarrass. Il a conclu que certains de ces signes seront de moins en moins visibles avec le temps et, à terme, devraient disparaître comme ceux, par exemple, existants sur la plante des deux pieds. Il a également conclu que l’examen physique a uniquement été effectué sous lumière artificielle.

Selon les informations que nous avons reçues, M. Aarrass a été transféré à la prison de Salé II après la réunion avec le Rapporteur spécial. Il est rapporté qu’un agent de la prison, M. Bouazza, aurait harcelé M. Aarrass cette nuit-là, exigeant de lui de fournir des détails sur la visite et sur la discussion avec le Rapporteur spécial.

Il est en outre signalé que, dans sa réponse, M. Aarrass a déposé une plainte contre l’agent de prison auprès des autorités de la prison le lendemain, 21 septembre 2012. Il est allégué que le 22 septembre 2012, les autorités pénitentiaires auraient menacé M. Aarrass ou fait pression sur lui pour qu’il retire sa plainte. Il est rapporté que suite aux menaces et actes d’’intimidation proférées, notamment par M. Bouazza, directeur adjoint de la prison de Salé II, à l’encontre de M. Aarrass, ce dernier a retiré sa plainte. Toutefois, le harcèlement et les menaces ont continué d’être proférés. La dernière information reçue en date du 12 novembre 2012, indique que M. Bouazza aurait menacé M. Aarrass de viol, de rendre sa vie en prison impossible et qu’il aurait emporté le chauffe-eau utilisé par M. Aarrass afin de chauffer l’eau pour se laver.

D’autres membres du personnel pénitentiaire sont impliqués dans les mauvais traitements à l’encontre de M. Ali Aarrass depuis son arrivée à la prison de Salé II sont M. Mustafa El Hajri, ancien directeur; M. Mohamed El Athimi, ancien directeur adjoint; et M. Hamid Allali, infirmier. Il est rapporté que le nouveau directeur de l’établissement aurait promis à M. Aarrass qu’il préviendrait le harcèlement et les mauvais traitements dans l’avenir et que les conditions de vie dans la prison de Salé II seraient améliorées. Toutefois, le harcèlement et les menaces par le personnel pénitentiaire se poursuivent.

 

Il est également allégué que les autorités carcérales continuent de rejeter les demandes d’examen et de traitements médicaux appropriés à M. Aarrass. Selon les sources, M. Aarrass souffre de plusieurs maux qui nécessitent des soins médicaux immédiats, tels qu’éruption cutanée douloureuse, épilepsie, hémorroïdes et problèmes dentaires. Il est rapporté que le personnel médical de la prison de Salé II refuse de recevoir M. Aarrass s’il ne paie pas pour ce service.

Des craintes ont été exprimées quant au fait que M. Aarrass puisse être l’objet de torture ou de cruels et mauvais traitements. Sans vouloir à ce stade me prononcer sur les faits qui m’ont été soumis, je souhaiterais néanmoins intervenir auprès du Gouvernement de votre Excellence pour tirer au clair les circonstances ayant provoqué les faits allégués ci-dessus, afin que soit protégée et respectée ‘intégrité physique et mentale de M. Aarrass et ce, conformément aux dispositions pertinentes de la Déclaration universelle des droits de l’homme, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et de la Convention contre la Torture.

Quant aux allégations concernant les actes de torture et de mauvais traitements à l’encontre de M. Aarrass pendant sa détention provisoire, je souhaiterais attirer ‘attention du Gouvernement de votre Excellence sur le paragraphe 1 de la résolution 16/23 du Conseil des droits de l’homme qui « condamne toutes les formes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, y compris l’intimidation, qui sont et demeurent prohibés, en tout temps et en tout lieu, et ne peuvent jamais être justifiés, et invite tous les États à mettre pleinement en œuvre l’interdiction absolue et intangible de la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. « 

De plus, j’aimerais attirer l’attention du Gouvernement de votre Excellence sur l’article 15 de ladite Convention qui stipule que «Tout Etat partie veille à ce que toute déclaration dont il est établi qu’elle à été obtenue par la torture ne puisse être invoquée comme un élément de preuve dans un procédure, si ce n’est contre la personne accusée de torture pour établir qu’une déclaration a été faite.» L’Assemblé Générale, dans le paragraphe 7 de sa Résolution A/RES/61/153 du 14 février 2007, a réitéré cette demande.

Je souhaiterais également rappeler l’article 12 de la Convention contre la torture, à laquelle le Maroc a adhéré en 21 juin 1993, qui stipule que «Tout Etat partie veille à ce que les autorités compétentes procèdent immédiatement à une enquête impartiale chaque fois qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’un acte de torture a été commis sur tout territoire sous sa juridiction.» et l’article 7 qui veut que des cas de torture soient soumis aux autorités compétentes pour l’exercice de l’action pénale. Je voudrais aussi attirer l’attention du Gouvernement de votre Excellence sur le paragraphe 3 de la Résolution 8/8 du Conseil de Droits de l’Homme, qui exhorte les Etats «À prendre des mesures durables, décisives et efficaces pour que toutes les allégations de torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants soient examinées promptement et en toute impartialité par l’autorité nationale compétente et que ceux qui encouragent, ordonnent,tolèrent ou commettent des actes de torture, notamment les responsables du lieu de détention où il est avéré que l’acte interdit a été commis, en soient tenus responsables,traduits en justice et sévèrement punis et à prendre note à cet égard des Principes relatifs aux moyens d’enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et d’établir la réalité de ces faits (Protocole d’Istanbul), qui peuvent contribuer utilement à lutter contre la torture;» (6b).

Quant aux allégations portant sur les actes de harcèlement et d’intimidation envers M. Aarrass suite à la réunion qui s’est tenue avec le Rapporteur spécial, je souhaiterais rappeler que pendant sa visite au Maroc, le Rapporteur spécial a demandé et reçu l’assurance des autorités que des instructions claires seraient communiquées à tous les niveaux de pouvoir et que ni l’intimidation, ni aucune sorte de représailles ne sauraient être tolérées.

A cette égard, je souhaiterais aussi attirer l’attention du Gouvernement de votre Excellence sur le paragraphe 7b de la Résolution 8/8 du Conseil des droits de l’homme de juin 2008 laquelle rappelle aux Etats que «Les mesures d’intimidation ou les pressions visées à l’article premier de la Convention contre la torture, notamment les menaces graves et crédibles contre l’intégrité physique de la victime ou d’une tierce personne, ainsi que les menaces de mort, peuvent être assimilées à un traitement cruel, inhumain ou dégradant ou à la torture.»

Finalement, je tiens à rappeler au Gouvernement de votre Excellence les dispositions de la résolution 12/2 du Conseil des droits de l’homme (A/HRC/RES/12/2), qui, entre autres, «condamne tous les actes d’intimidation sur les représailles de la part des gouvernements et des acteurs non étatiques contre des individus et des groupes qui cherchent à coopérer ou ont coopéré avec l’Organisation des Nations Unies, ses représentants et mécanismes dans le domaine des droits de l’homme» (OP 2) et «invite tous les États à assurer une protection adéquate contre les actes d’intimidation ou de représailles pour les individus et les groupes qui cherchent à coopérer ou ont coopéré avec l’Organisation des Nations Unies, ses représentants et mécanismes dans le domaine des droits de l’homme (…)» (OP 3).

Il est de ma responsabilité, en vertu du mandat qui m’a été confié par le Conseil des droits de l’homme, de solliciter votre coopération afin de tirer au clair les cas qui ont été portés à mon attention. Etant dans l’obligation de faire rapport de ces cas au Conseil des droits de l’homme, je serais reconnaissant au Gouvernement de votre Excellence de ses observations sur les points suivants :

1. Les faits tels que relatés dans le résumé du cas sont-ils exacts?

2. Veuillez fournir la décision écrite de la Cour d’appel du 2 Octobre 2012, et veuillez préciser dans quelle mesure les allégations de torture ont été étudiées par les procureurs, les juge d’instruction et par la Cour de première instance et d’appel dans le cas de M. Aarrass. Veuillez également fournir les détails, et le cas échéant les résultats de ces enquêtes. Si aucune enquête n’a eu lieu ou si elles n’ont pas été concluantes, veuillez s’il vous plaît en indiquer les raisons.

3. Veuillez s’il vous plaît indiquer quelles mesures seront prises afin d’assurer que toute déclaration, dont il est établi qu’elle a été faite suite à des actes de torture, ne puisse être invoquée comme preuve dans une procédure juridique conformément à l’article 15 de la Convention contre la torture.

4. Veuillez s’il vous plaît fournir des informations sur les mesures prises pour empêcher d’autres actes de harcèlement et de mauvais traitements à l’encontre de M. Aarrass en prison. Pourriez-vous également fournir des détails et, lorsqu’ils seront disponibles, les résultats des enquêtes sur les actes de harcèlement récents et de mauvais traitements envers M. Aarrass après la visite du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Si aucune enquête n’a eu lieu,veuillez s’il vous plaît en indiquer les raisons.

5. Veuillez s’il vous plaît fournir des informations sur les mesures qui seront prises pour assurer que M. Aarrass obtiendra immédiatement le traitement médical adéquat. Veuillez également expliquer quelles mesures ont été prises pour permettre l’accès à un médecin indépendant et pour quelles raisons une telle demande peut être refusée.

Je serais reconnaissant de recevoir de votre part une réponse à ces questions dans un délai de 60 jours. Je m’engage à ce que la réponse du Gouvernement de votre Excellence à chacune de ces questions soit reflétée dans le rapport que je soumettrai à la session de mars 2013 du Conseil des droits de l’homme.

Dans l’attente d’une réponse de votre part, je prie le Gouvernement de votre Excellence de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection des droits et des libertés de M. Aarass, de diligenter des enquêtes sur les violations qui auraient été perpétrées et de traduire les responsables en justice. Je prie aussi le Gouvernement de votre Excellence d’adopter, le cas échéant, toutes les mesures nécessaires pour prévenir la répétition des faits mentionnés.

 

Veuillez agréer, Excellence, l’assurance de ma très haute considération.

Juan E. Méndez

Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels,inhumains ou dégradants

 

 

Amnesty International (rapport 2013) sur le Belge Ali Aarrass : « extradition illégale et torture » (français, English)

dans COMMUNIQUES DE PRESSE/EXTRADITION/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS/TORTURE par

Français : Extrait Amnesty International Rapport 2013 La situation des droits humains dans le monde :

« Maroc : Lutte contre le terrorisme et sécurité

Les personnes soupçonnées d’actes de terrorisme, entre autres infractions liées à la sécurité, risquaient d’être torturées ou maltraitées et de ne pas bénéficier d’un procès équitable.

Ali Aarass, reconnu coupable en novembre 2011 d’appartenance à une organisation terroriste, a vu sa peine de 15 ans d’emprisonnement ramenée à 12 ans par la cour d’appel de Salé. Un recours en cassation était en instance à la fin de l’année. Cet homme avait été extradé par l’Espagne vers le Maroc en décembre 2010, en violation de mesures provisoires ordonnées par le Comité des droits de l’homme [ONU] car il risquait d’être torturé et maltraité au Maroc. Il aurait été contraint de faire des « aveux » sous la torture.

En août, le Groupe de travail sur la détention arbitraire [ONU] a conclu que la détention de Mohamed Hajib, ressortissant germano-marocain, était arbitraire ; il a demandé au gouvernement marocain de remettre cet homme en liberté. Mohamed Hajib avait été déclaré coupable en 2010 d’infractions liées au terrorisme sur la base d’aveux qui auraient été obtenus sous la torture pendant sa détention provisoire, en l’absence d’un avocat. Il avait été condamné à une peine de 10 ans d’emprisonnement, qui a été ramenée à cinq ans en janvier. Il était maintenu en détention à la fin de l’année. Ses allégations de torture n’ont pas fait l’objet d’une enquête. »

English : excerpt from Amnesty International Annual Report 2013 The State of the Human rights in the world

 « Morocco : Counter-terror and security

 People suspected of terrorism or other security-related crimes were at risk of torture or other ill-treatment and unfair trials.

 Ali Aarrass, who was convicted of belonging to a terrorist organization in November 2011, had his 15-year prison sentence reduced to 12 years by the Sale Court of Appeal. A further appeal to the Court of Cassation was pending at the end of the year. He had been extradited from Spain to Morocco in December 2010 contrary to interim measures issued by the UN Human Rights Committee due to a risk of torture and other ill-treatment in Morocco. He was reported to have been made to « confess » under torture.

 In August, the UN Working Group on Arbitrary Detention declared the detention of Mohamed Hajib, a Moroccan/German national, to be arbitrary, and urged the Moroccan authorities to release him. He was convicted of terrorism offences in 2010 on the basis of a confession allegedly obtained under torture while he was held in pre-trial detention and denied access to a lawyer. Mohamed Hajib received a 10-year prison sentence, reduced to five years in January. He was still held at the end of the year. The authorities did not investigate his torture allegations. »

AI Rapport 2013 : Le Maroc et Sahara Occidental

AI Report 2013 : Morocco/Western Sahara

Le nouveau rapport d’Alkarama : « Le cas d’Ali Aarrass est particulièrement éloquent.. » 

dans ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS par

« Le cas de M. Ali Aarrass, citoyen Belge d’origine marocaine, bien que déjà cité dans le rapport alternatif soumis au Comité, nous semble particulièrement éloquent sur l’absence de sérieux dans les enquêtes relatives aux allégations de tortures à la lumière des derniers éléments relatifs à l’expertise médicale qu’il a subi ». C’est ce qu’on peut lire dans le nouveau rapport de l’organisation Alkarama (http://fr.alkarama.org/ Alkarama Foundation, 2bis Chemin des Vignes, 1209 Genève, Suisse ) du 26 avril 2013, adressé au Comité contre la torture de l’ONU.

Voci de larges extraits de ce rapport qui porte le titre : « Des avancées encourageantes et des défis importants . Soumission de la liste des questions dans le cadre de l’examen du 5ème rapport périodique du Maroc par le Comité contre la torture. »

 

« ..Malgré les nombreuses recommandations des organisations de droits de l’homme comme des divers organes des Nations Unies, la loi anti-terroriste 03-03 reste toujours en vigueur dans sa forme initiale… De nombreuses personnes (entre 500 et 850 selon diverses sources) restent à ce jour détenues après avoir été condamnées en vertu de cette loi. » (pg 3)

 « ..A la suite des attentats du 16 mai 2003, des milliers de suspects ont été arrêtés, inculpés pour appartenance à un groupe terroriste, préparation d’actes terroristes et/ou atteinte à la sûreté de l’Etat. Ils ont souvent été arrêtés par des agents de la DGST, alors même que ces derniers n’étaient pas habilités légalement à procéder à ces arrestations. Ils se déplaçaient souvent en tenue civile dans des voitures banalisées. Les personnes interpellées n’étaient pas informées des raisons de ces arrestations sans mandats de justice.

Les suspects étaient le plus souvent enlevés et maintenus au secret dans les locaux de la DGST et en particulier au centre de Temara pour être interrogés pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois avant d’être remis aux services de la police judiciaire.

Les familles n’étaient pas été informées du lieu où se trouvaient les personnes arrêtées et les autorités niaient le plus souvent leurs détentions. Afin de masquer ces détentions abusives, les dates d’arrestation étaient modifiées dans les procès verbaux établis par la police judiciaire.

Ce modus operandi avait pour objectif d’extorquer des déclarations des suspects sous la torture ou diverses autres formes de contraintes. Les « aveux » étaient consignés dans des procès verbaux de la police judiciaire qui serviront de base aux poursuites pénales.

Si cette pratique semble avoir régressé d’une manière notable depuis 2012, Alkarama n’ayant pas depuis relevé de situations de ce type, les personnes condamnées sur la base des aveux extorqués dans les conditions décrites restent en détention à ce jour. » (pg 5)

« Les procès verbaux d’enquête préliminaire établis par la police judiciaire qui se basent sur des « aveux » faits sous contrainte ne sont très rarement rejetés par le juge. Les condamnations pénales sont dans la grande majorité des cas fondées sur ces seuls éléments de procédure. Le juge pénal privilégie une interprétation de l’article 291 du Code de procédure pénale considérant que les procès verbaux établis par la police judiciaire « font foi jusqu’à preuve contraire ». La prise en compte de ces aveux par les juges constitue cependant une violation manifeste de l’article 293 du même Code qui prévoit expressément que toute déclaration obtenue par la torture est frappée de nullité. » (pg 5-6)

«.. L’article 74, alinéa 8, du Code de procédure pénale fait obligation au Procureur du Roi d’ordonner une expertise médicale dès lors qu’un acte de violence ou des tortures sont portés à sa connaissance. L’article 134 alinéa 5, oblige par ailleurs, le juge d’instruction à ordonner l’examen médical immédiat de toute personne sur laquelle des signes de torture sont relevés. Or il est aisé de constater que l’application de ces dispositions légales relatives à l’ouverture d’une enquête judiciaire sur des allégations de tortures et à l’instauration d’examens médicaux ne sont pas garantis dans la pratique et que les poursuites contre les responsables restent dans ces conditions illusoires.. » (pg 8)

« Dans les rares cas où des enquêtes sont diligentées sur les allégations de torture, les médecins chargés de l’expertise médicale rendent le plus souvent des rapports non conformes aux standards internationaux et notamment du Protocole d’Istanbul. Les médecins désignés pour mener l’expertise sont des fonctionnaires relevant de la Délégation Générale de l’Administration Pénitentiaire et de la Réinsertion et non du ministère de la santé. Leur indépendance ne semble pas, dans ces conditions,être totalement assurée.

Le cas de M. Ali Aarrass, citoyen Belge d’origine marocaine, bien que déjà cité dans le rapport alternatif soumis au Comité, nous semble particulièrement éloquent sur l’absence de sérieux dans les enquêtes relatives aux allégations de tortures à la lumière des derniers éléments relatifs à l’expertise médicale qu’il a subi.

Rappelons qu’il avait été arrêté à Algésiras, en Espagne le 1er avril 2008 et placé en détention, avant d’être extradé vers le Maroc 14 décembre 2010, malgré la demande expresse du Comité des droits de l’homme de ne pas l’extrader, en raison des risques de torture qu’il encourrait au Maroc. Dès son arrivé au Maroc, il a été détenu au secret pendant plus de dix jours, gravement torturé et contraint de signer des aveux, en arabe, langue qu’il ne lit pas. C’est sur la base de ces aveux obtenus sous la torture qu’il a été condamné le 24 novembre 2011 à 15 années d’emprisonnement ferme. Ce n’est qu’à la suite de la saisine du Comité contre la Torture que M. Aarrass a fait l’objet d’une expertise médicale pour vérifier ses allégations.

Le rapport d’expertise médicale établi par trois médecins désignés par le Procureur général près la Cour de Rabat concluant à l’absence « de traces pouvant être en rapport avec des actes de torture allégués », a été analysé par un expert indépendant de l’association IRCT (International Rehabilitation Council for Torture Victims) qui en a relevé les nombreuses failles et insuffisances.

Il souligne que ce rapport médico-légal est « bien en deçà des normes internationalement admises pour l’examen médical des victimes de la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, tels qu’il sont définis par le Protocole d’Istanbul ».

Il précise notamment que le rapport médico-légal, très bref, « ne fournit presque aucun détail sur les examens effectués, et une description très partielle des résultats de ces examens.[…] Aucune tentative n’est faite dans le rapport pour corréler, ou non, les résultats de l’examen physique avec les allégations de torture, ni d’ailleurs avec des antécédents de traumatisme. […] Il n’apparaît nulle part que M. Aarrass ait consenti à cet examen, ni dans quelles conditions ce dernier s’est déroulé (durée de l’examen, autres personnes présentes, détenu menotté ou non etc). […] Il relève l’absence de diagrammes du corps d’appui et de photographies annexées au rapport qui indiqueraient plus précisément la position anatomique et la nature des marques indiquées[…]. Le rapport médical ne fait aucune mention d’une évaluation psychologique ou psychiatrique, en dépit des problèmes de concentration, la peur et le stress excessif décrits par la victime. Il s’agit d’une omission importante de l’évaluation et du rapport, qui démontre que l’examen n’est pas conforme aux normes internationales pour l’évaluation des allégations de torture».

Ces insuffisances ont également été soulignées par le Rapporteur spécial sur la torture, M. Juan Méndez, à la suite de sa visite dans le pays en septembre 2012. En effet, ce dernier relève après examen d’un échantillon de certificats médicaux, « que la plupart des examens médicaux sont effectués non pas par des experts médico-légaux mais par de simples cliniciens figurant dans les listes d’«experts» des tribunaux. Ces personnes n’ont aucune formation ou compétence spécifique en matière de médecine légale. Les rapports médicaux produits à la suite d’allégations de torture et de mauvais traitements sont de très mauvaise qualité; ils ne sont pas conformes aux normes minimales internationales régissant les examens médico-légaux auxquels ont droit les victimes et ne sont pas acceptables en tant que preuves médico-légales. Ni le personnel de santé des prisons ni les cliniciens qui remplissent la fonction d’expert auprès des tribunaux n’ont la formation requise pour évaluer, interpréter et documenter les actes de torture et les mauvais traitements.» (pg 8-9)

« Conclusion. Les changements législatifs introduits depuis 2011 et le processus de ratification en cours, et en particulier du protocole facultatif à la Convention contre la torture, prévoyant la création d’un mécanisme national de visite des lieux de détention, constituent des signes encourageants dans le renforcement de l’Etat de droit au Maroc. Par ailleurs, le processus de réforme du système judiciaire constituera une avancée particulièrement attendue qui doit aboutir à une indépendance réelle du pouvoir judicaire. Cependant, le passif de la période ayant suivi les attentats de Casablanca de 2003 marqué par le recours massif à la détention au secret, à la torture et aux procès inéquitables, dénoncés par toutes les organisations locales et internationales des droits de l’homme, constitue encore un problème réel de société et doit être reconnu. Ce problème ne pourra être dépassé qu’avec une prise de décision courageuse de libérer les centaines de détenus condamnés à la suite de procès inéquitables fondés le plus souvent sur des aveux arrachés sous la torture et de garantir la non répétition de telles pratiques. Nous espérons qu’un dialogue constructif entre le Comité et les autorités marocaines permettra d’approfondir ces sujets de préoccupation dans le but de combattre efficacement la torture et les autres violations des droits fondamentaux qui la favorisent. » (pg 9-10)

 

Torture au Maroc : le rapport Mendez bientôt rendu public

dans DANS LA PRESSE/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS par

Le rapport final du Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, Juan Mendez, sera dévoilé dans quelques jours à Genève lors de la 22e session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.

L’argentin Juan Mendez, Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, présentera son rapport final sur la torture au Maroc dans quelques jours, à l’occasion de la 22e session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU à Genève.

Ce rapport, le premier du genre, fait suite à sa visite au Maroc en septembre dernier. Juan Mendez avait passé une dizaine de jours dans le royaume pour rencontrer les autorités marocaines, des représentants de la justice, de la société civile, des groupes de défense des droits de l’homme, des agences de l’ONU, ainsi que des victimes de violences et leurs familles.

Juan Mendez avait fait part de ses premières observations fin septembre lors d’une conférence de presse donnée à Rabat. Il affirmait alors que « le Maroc développe une culture de respect des droits de l’homme qui est un bon point de départ en vue de l’élimination de la torture dans un futur proche. Mais le pays est loin de pouvoir affirmer qu’il a éliminé la torture ».

Il expliquait notamment : « Chaque fois qu’il est question de sécurité nationale, il y a une tendance à utiliser la torture dans les interrogatoires. Il est difficile de dire si c’est très répandu ou si c’est systématique, mais cela arrive assez souvent pour que le gouvernement marocain ne puisse l’ignorer ».

Torture, impunité, prisons secrètes : ce que dit l’ONU

Pour rédiger son rapport final, Juan Mendez a pu s’appuyer sur les travaux du Comité de l’ONU sur la torture, qui a présenté son rapport périodique Maroc en juin 2012. Ce document fait en effet un point complet sur les sujets de préoccupation du Comité, la collaboration de l’Etat marocain et les recommandations de l’ONU.

Voici ci-dessous les grands axes de ce rapport Maroc, qui n’a fait l’objet d’aucune publicité dans le royaume depuis sa publication.

Aspects positifs

Le Comité de l’ONU sur la torture se félicite du « dialogue constructif » entre ses experts et l’Etat marocain. Il note également « avec satisfaction » la ratification par le Maroc d’un certain nombre de conventions internationales, de la mise en place du CNDH, du vote de la nouvelle constitution et du lancement de la réforme de la justice.

Définition et criminalisation de la torture

Selon le Comité, le Maroc « devrait s’assurer que les projets de loi actuellement devant le Parlement étendent le champ de la définition de la torture, conformément à l’article premier de la Convention contre la torture. L’État partie, conformément à ses obligations internationales, devrait veiller à ce que quiconque se rend coupable ou complice d’actes de torture, tente de commettre de tels actes ou participe à leur commission fasse l’objet d’une enquête, et soit poursuivi et sanctionné sans pouvoir bénéficier d’un délai de prescription.

Utilisation de la torture dans les affaires de sécurité

Le Comité se dit « préoccupé par les nombreuses allégations d’actes de torture et de mauvais traitements commis par les officiers de police, les agents pénitentiaires et plus particulièrement les agents de la Direction de surveillance du territoire (DST) – désormais reconnus comme officiers de police judiciaire – lorsque les personnes, en particulier celles suspectées d’appartenir à des réseaux terroristes ou d’être des partisans de l’indépendance du Sahara occidental, sont privées de l’exercice des garanties juridiques fondamentales comme l’accès à un avocat ou durant les interrogatoires dans le but de soutirer des aveux aux personnes soupçonnées de terrorisme ».

Impunité des responsables de torture

Le Comité « est particulièrement préoccupé par le fait de n’avoir reçu à ce jour aucune information faisant état de la condamnation d’une personne pour actes de torture au titre de l’article 231.1 du Code pénal. Le Comité note avec préoccupation que les officiers de police sont dans le meilleur des cas poursuivis pour violences ou coups et blessures, et non pour le crime de torture, et que selon les données fournies par l’État partie, les sanctions administratives et disciplinaires prises à l’endroit des officiers concernés ne semblent pas proportionnées à la gravité des actes commis. Le Comité note avec préoccupation que les allégations de torture, pourtant nombreuses et fréquentes, font rarement l’objet d’enquêtes et de poursuites et qu’un climat d’impunité semble s’être instauré en raison de l’absence de véritables mesures disciplinaires et de poursuites pénales significatives contre les agents de l’État accusés des actes visés dans la Convention, y compris les auteurs des violations graves et massives des droits de l’homme commises entre 1956 et 1999 ».

« Transfèrements secrets » de la CIA

Le Comité « prend note des déclarations de l’État partie selon lesquelles il n’était pas impliqué dans les opérations de «transfèrements secrets» menées dans le contexte de la lutte internationale contre le terrorisme. Néanmoins, le Comité reste préoccupé par les allégations selon lesquelles le Maroc aurait servi de point de départ, de transit et de destination de «transfèrements secrets» opérés en dehors de tout cadre légal, notamment dans les cas de MM. Mohamed Binyam, Ramzi bin al-Shib et Mohamed Gatit. Il note que les informations lacunaires fournies par l’État partie sur les enquêtes qu’il a menées à ce sujet ne sont pas à même de dissiper ces allégations. Le Comité est gravement préoccupé par les allégations selon lesquelles tous ces «transfèrements secrets» se seraient accompagnés de détention au secret et/ou dans des lieux secrets, d’actes de torture et de mauvais traitements, notamment lors des interrogatoires des suspects, ainsi que de refoulements vers des pays dans lesquels les personnes auraient été également soumises à la torture ».

Les prisons secrètes du Maroc

Le Comité « prend note des déclarations faites par l’État partie durant le dialogue selon lesquelles il n’existait aucun centre de détention secret au siège de la DST à Témara, comme l’attestaient les résultats des trois visites effectuées par le Procureur général du Roi en 2004, mais aussi par les représentants de la Commission nationale des droits de l’homme et par plusieurs parlementaires en 2011. Toutefois, le Comité regrette le manque d’informations relatives à l’organisation et à la méthodologie de ces visites, qui au vu de la situation et des allégations nombreuses et persistantes de l’existence d’un tel centre de détention secret ne permettent pas de lever le doute sur ce point. Cette question reste donc un objet de préoccupation pour le Comité. Ce dernier est également préoccupé par les allégations selon lesquelles des lieux de détention secrets existeraient également au sein même de certains établissements de détention officiels. D’après les allégations reçues par le Comité, ces centres de détention secrets ne feraient l’objet d’aucune surveillance ni inspection de la part d’organes indépendants. Pour finir, le Comité est préoccupé par les allégations selon lesquelles une nouvelle prison secrète aurait été construite dans les environs d’Ain Aouda, près de la capitale de Rabat, pour y détenir les personnes soupçonnées d’être liées à des mouvements terroristes ».

Torture au Sahara

Le Comité « est préoccupé par les allégations faisant état d’arrestations et de détentions arbitraires, de détentions au secret et dans des lieux secrets, d’actes de torture et de mauvais traitements, de l’extorsion d’aveux sous la torture et d’un usage excessif de la force par les forces de sécurité et par les forces de l’ordre marocaines au Sahara occidental. »

Traitement des migrants et des étrangers

Le Comité « prend note » des informations fournies par le Maroc mais « reste toutefois préoccupé par les informations reçues selon lesquelles, dans la pratique, des migrants illégaux ont été reconduits à la frontière ou expulsés en violation des lois marocaines, sans avoir eu la possibilité de faire valoir leurs droits. Suivant plusieurs allégations, des centaines d’entre eux auraient été abandonnés dans le désert sans eau ni nourriture. Le Comité déplore le manque d’information sur ces événements de la part de l’État partie, ainsi que sur les lieux et les régimes de détention des étrangers en attente d’expulsion qui ne relèvent pas de l’administration pénitentiaire. Le Comité déplore enfin le manque d’information au sujet des enquêtes éventuellement menées sur les violences commises par les forces de l’ordre à l’encontre de migrants clandestins dans les régions de Ceuta et Melilla en 2005 ».

Coopération avec les mécanismes de l’ONU

Le Comité recommande au Maroc « d’intensifier sa coopération avec les mécanismes des droits de l’homme de l’ONU, notamment en autorisant les visites, entre autres, du Groupe de travail sur la détention arbitraire, de la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, et du Rapporteur spécial sur le droit de réunion et d’association pacifiques ».

Il invite aussi le Maroc « à envisager d’adhérer aux principaux instruments relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, notamment au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et au Statut de Rome de la Cour pénale internationale ». (un projet de loi a été validé en décembre dernier par le gouvernement pour ratifier ce protocole facultatif à la Convention contre la torture).

Enfin, le Comité de l’ONU exhorte le Maroc « à diffuser largement les rapports qu’il a soumis au Comité, ainsi que les conclusions et recommandations de celui-ci, par le biais des sites Internet officiels, des médias et des organisations non gouvernementales ».

 Écrit par Christophe Guguen

Source : http://fr.lakome.com/index.php/politique/375-torture-au-maroc-le-rapport-mendez-bientot-rendu-public

La Fondation Alkarama (octobre 2012) sur deux Belges, détenus aux Maroc : Ali Aarrass et Hicham Bouhali Zriouil.

dans ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS par

Sur le Belge Ali Aarrass

 

« Le cas de M. Ali Aarrass, citoyen Belge d’origine marocaine, bien que déjà cité dans le rapport alternatif soumis au Comité, nous semble particulièrement éloquent sur l’absence de sérieux dans les enquêtes relatives aux allégations de tortures à la lumière des derniers éléments relatifs à l’expertise médicale qu’il a subi.

Rappelons qu’il a été arrêté à Algésiras, en Espagne le 1er avril 2008 et placé en détention, avant d’être extradé vers le Maroc 14 décembre 2010, malgré la demande expresse du Comité des droits de l’homme de ne pas l’extrader, en raison des risques de torture qu’il encourrait au Maroc. Dès son arrivé au Maroc, il a été détenu au secret pendant plus de dix jours, sauvagement torturé et contraint de signer des aveux, en arabe, langue qu’il ne lit pas. C’est sur la base de ces aveux obtenus sous la torture qu’il a été condamné le 24 novembre 2011 à 15 années d’emprisonnement ferme.

A la suite de sa saisine du Comité contre la Torture, M. Aarrass a fait l’objet d’une expertise médicale pour vérifier ses allégations, ce qui n’est que très rarement le cas pour les nombreux autres détenus condamnés sur la base d’aveux sous la torture et pour lesquels les juges ne prêtent aucune attention à leurs allégations.

Cet examen mené par 3 médecins désignés par le Procureur général près la Cour de Rabat, et qui a conclu à l’absence « de traces pouvant être en rapport avec des actes de torture allégués », a été analysée par un médecin indépendant de l’association IRCT (International Rehabilitation Council for Torture Victims), qui en a relevé les nombreuses failles.

Il souligne que ce rapport médico-légal est « bien en deçà des normes internationalement admises pour l’examen médical des victimes de la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, tels qu’il sont définis par le Protocole d’Istanbul ».

Il précise notamment que le rapport médico-légal très bref, « ne fournit presque aucun détail sur les examens effectués, et une description très partielle des résultats de ces examens.[…] Aucune tentative n’est faite dans le rapport pour corréler, ou non, les résultats de l’examen physique avec les allégations de torture, ni d’ailleurs avec des antécédents de traumatisme. […] Il n’apparait nulle part que M. Aarrass ait consenti à cet l’examen, ni dans quelles conditions ce dernier s’est déroulé (durée de l’examen, autres personnes présentes, détenu menotté ou non etc). […] Il relève l’absence de diagrammes du corps d’appui et de photographies annexées au rapport qui indiqueraient plus précisément la position anatomique et la nature des marques indiquées[…].

Le rapport médical ne fait aucune mention d’une évaluation psychologique ou psychiatrique, en dépit des problèmes de concentration, la peur et le stress excessif décrits par la victime. Il s’agit d’une omission importante de l’évaluation et du rapport, qui démontre que l’examen n’est pas conforme aux normes internationales pour l’évaluation des allégations de torture».

On peut ainsi légitimement s’interroger sur l’indépendance des médecins désignés par les autorités de l’Etat partie pour effectuer des expertises médicales et pour enquêter sur les allégations de tortures comme dans le cas de M. Bouchta Charef, cité en exemple par les autorités marocaines dans ses réponses aux recommandations finales du CAT.

Il convient de rappeler qu’après la publication de la vidéo relative à M. Bouchta Charef postée le 19 avril 2011 sur Youtube, dans laquelle il témoigne des tortures subies lors de sa détention au secret à Témara et notamment d’avoir été violé par ses geôliers au moyen d’une bouteille, et de son appel à des associations médicales indépendantes à venir constater les violations subies par les détenus dans les prisons marocaines, les autorités du pays on accordé une attention particulière à cette affaire fortement médiatisée.

L’expertise en question avait été réalisée par des médecins choisis par l’administration pénitentiaire en présence d’agents des services de sécurité. M. Charef a fait savoir qu’il avait vécu cet examen médical comme une humiliation supplémentaire et a contesté les conclusions des experts en continuant à revendiquer le droit d’être examiné par des médecins indépendants pour vérifier ses allégations.

Ainsi, la dénonciation publique de la torture par le ministre de la Justice laissait espérer des mesures concrètes pour mettre un terme définitif à cette pratique à commencer par des enquêtes sérieuses et indépendantes sur les allégations de tortures et la poursuite des auteurs.

Or, tous les cas cités ci-dessus illustrent que les interventions des autorités marocaines dans les affaires les plus médiatisées et les expertises menés par des médecins choisis par les autorités sont insuffisantes. Ces médecins mènent des examens en toute hâte et en présence de membres des services de sécurité. Ces conditions ne sont pas conformes au Protocole d’Istanbul relatif aux standards internationaux d’enquête sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Quant aux médecins légistes indépendants, proposés par les associations pour mener des expertises médicales pour les détenus qui ont affirmé avoir été torturés, ils sont systématiquement refusés par l’administration pénitentiaire, qui reste nous le rappelons, placée sous l’autorité directe du Palais royal et non du ministère de la justice ». (page 7)

 

Sur le Belge Hicham Bouhali Zriouil

 

« Malgré ces recommandations, la loi anti-terroriste 03-03 reste toujours en vigueur dans sa forme initiale. Elle n’a pas été révisée tant pour la question relative à la définition même du terrorisme que pour celle des délais de garde à vue et des garanties fondamentales des prévenus.

Ainsi, la même définition vague et extensive du terrorisme reste applicable ainsi que le fait que la faculté de poursuivre des personnes pour les délits d’apologie et d’incitation au terrorisme, définis d’une manière particulièrement vague et sans que les faits poursuivis ne comportent nécessairement un risque concret d’action violente.

De nombreuses personnes restent à ce jour détenues après avoir été condamnées en vertu de cette loi. D’autres sont, encore aujourd’hui, arrêtées ou extradées sous l’emprise de cette loi, y compris pour des motifs politiques.

C’est ainsi que M. Hicham Bouhaili Zriouil, citoyen Belge d’origine marocaine, accusé de terrorisme et arrêté en Syrie le 25 juillet 2011, a été extradé vers le Maroc le 11 octobre 2011, par la force et pour des motifs inconnus, alors que la Belgique, pays dont il est ressortissant, avait émis un mandat d’arrêt international contre lui.

A son arrivé au Maroc, M. Bouhaili Zriouil a été détenu au secret et interrogé pendant plus d’une semaine par les services de sécurité et contraint de témoigner contre lui-même sous la contrainte.

Il a été accusé de « formation d’un groupe terroriste en vue de commettre des actes terroristes et l’agression intentionnelle de la vie d’autrui et à leur sécurité » , d’« atteinte à la sûreté nationale », d’« incitation à l’intimidation et à la violence » et d’« incitation d’autrui à commettre des crimes terroristes », et, bien qu’il ait formellement nié toutes ces accusations il a été condamné à vingt années d’emprisonnement ferme par la cour criminelle de Rabat, le 23 février 2012, le juge, s’étant basé pour justifier cette condamnation exclusivement sur les procès verbaux d’enquête préliminaire établis par les services de sécurité marocains et sur les procès verbaux d’audition de M. Zriouil établis au cours de sa garde à vue durant laquelle il a subi menaces et traitements cruels, inhumains et dégradants. Comme dans la grande majorité des affaires de terrorisme, aucune preuve ni aucun élément matériels n’ont été produits par l’accusation pouvant justifier la condamnation ». (Page 5)

Outsourcing Justice: A Tale of Two Extraditions

dans ACTIONS/DOUBLE NATIONALITE/EXTRADITION/FRIENDS OF ALI AARRASS LONDON SUPPORT COMMITTEE/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS/TORTURE par

November 7, 2012 · by Aisha Maniar

http://onesmallwindow.wordpress.com/2012/11/07/outsourcing-justice-a-tale-of-two-extraditions/

 

One Week in October

 

In the first week of October, two court cases took place in two different countries in different continents involving different people. Both cases, involving extradition from European countries, nonetheless display some striking similarities in the surrounding circumstances and hint at a worrying new European practice.

 

On 1st October, the Rabat Court of Appeal in Morocco reduced the conviction of Belgian-Moroccan national Ali Aarrass to 12 years from an initial 15 years on terrorism-related charges, which he claims he confessed to under torture. On 5th October, at the High Court in London, Babar Ahmad and Talha Ahsan, the Tooting Two, both British citizens, lost their combined decade-long fight against extradition to the United States on charges of alleged support for terrorism. They claim that pre-trial and possible post-trial imprisonment in the US would be tantamount to cruel and degrading treatment.

 

Say who?

 

Ali Aarrass, a 50-year old bookseller from Brussels, was born in the Spanish enclave of Melilla in North Africa in 1962. He moved to Belgium in 1977, aged 15, and obtained Belgian nationality in 1989. He was not involved in any political or religious organisations. In 2005, he returned to Melilla with his family where he ran a café. Suspected of involvement in bombings in Casablanca in 2003, he was arrested for the first time in Melilla in 2006. Released on bail after four days, he was arrested again in April 2008, when the Moroccan authorities requested his extradition on charges of terrorism involvement. He was held in custody in various Spanish jails until he was extradited on 14 December 2010. Following a thorough two-year investigation, in March 2009, Judge Baltazar Garzon, formerly one of Europe’s strictest anti-terrorism judges, found that there were insufficient grounds to implicate him in the attacks. Spain nonetheless acquiesced to the extradition request. Upon arrival, he promptly “disappeared” for 12 days during which he “confessed”; he maintains that he was tortured. This resulted in his conviction in November 2011 on charges of bringing weapons into Morocco and supporting a terrorist network, allegedly run by another Belgian-Moroccan, Abdelkader Belliraj, who was given a life sentence in 2009.

Meanwhile, in London, the ordeal of 38-year old Babar Ahmad, who worked in the IT department at Imperial College, University of London, started even earlier in 2003, in perhaps one of the most extraordinary cases of a miscarriage of justice in recent times. Babar Ahmad was arrested for the first time by anti-terrorism police at his Tooting home in December 2003; during that arrest, he sustained over 73 injuries. In 2009, Babar Ahmad was awarded £60,000 for the attack following admission of it by the police. No apology has been offered. In June 2011, four officers were found not guilty of assault. He was released 6 days later without charge.

 

In August 2004, he was arrested again pending extradition to the USA. The charges revolve largely around Babar Ahmad’s operation of websites alleged to support terrorist organisations, one of which was briefly hosted in the US, and soliciting funds for terrorist organisations. Although the alleged crimes are reported to have taken place in the United Kingdom, in July 2004, the Crown Prosecution Service (CPS) did not prosecute “on the basis that there was insufficient evidence in the UK for a successful prosecution”. He was indicted in the US. In May 2005, the senior district judge responsible for extraditions approved the extradition and in November that year, his extradition was ordered by the then Home Secretary Charles Clarke.

 

His co-accused, the lesser-known Talha Ahsan, was arrested in September 2006 on the same charges. A 33-year old graduate from the School of Oriental and African Studies, University of London, Talha Ahsan is an award-winning poet and suffers from Asperger’s Syndrome, making him more vulnerable. His extradition was approved by the court in March 2007 and ordered by the Home Secretary in June that year.

 

Having exhausted all avenues of appeal in the UK, the men took their case to the European Court of Human Rights (ECtHR) in Strasbourg. The Court stayed the extraditions and in a partial ruling in 2010 ordered the extraditions be stayed once more until it was ascertained that the men would not be subject to inhumane treatment, particularly with respect to the harsh conditions of detention there. In an extraordinary ruling in April 2012, the Court held that extradition to the US would not breach their human rights.

Their cases have attracted considerable attention. In 2011, over 140,000 people signed an e-petition to Prime Minister David Cameron seeking that the two men be tried in the UK. Under current government rules, an e-petition to the prime minister with over 100,000 signatures should lead to a specific debate in parliament on an issue. In the end, the issue was discussed as part of a wider debate disappointing campaigners. The two men have not tried to avoid prosecution: they have always insisted that if there are charges to answer and sufficient evidence to try them, that they be tried in the UK where the offences allegedly took place. To this end, in 2012, businessman Karl Watkins tried to bring a private prosecution against them under the Terrorism Act 2000. This case was dismissed on 4 October, a day before their extradition, for failing “to show a genuine intention to prosecute”. On 6 October both men pleaded not guilty to all charges before a Connecticut court. Since the extradition, there has been no telephone or written communication between the men and their families at all.

 

Observers at both trials reported the farcical nature of the trials in which the verdicts appeared to be long foregone. In the latter UK trial, it emerged that a US Department of Justice-owned jet plane had arrived from Washington on Tuesday at an air force base to collect the men, the same day the 4-day hearing started. The Independent newspaper also revealed that the Metropolitan Police, all the while claiming there was insufficient evidence to prosecute in the UK, handed evidence over to the FBI on at least nine occasions. This evidence was never seen by the CPS. Instead, European citizens were sent to other countries where the risk of torture and abuse of their right to a fair trial cannot be ruled out.

 

Torture and Extradition

 

In Ali Aarrass’ case, torture has been a feature throughout. The lack of evidence leading to the Spanish case against him being dismissed in 2009 was due to his name having been mentioned by a Moroccan prisoner who was tortured; the confession was later retracted. The two had never met and did not know each other. In this terrorist network investigation, more than 1500 people were arrested on suspicion of involvement, many of whom were tortured at Temara Prison, like Ali. In view of Human Rights Watch’s (HRW) October 2010 report on this very subject, concerns expressed by Amnesty International and then the United Nations Human Rights Committee’s (HRC) order to stay the extradition while his case was considered, there is no way that Spain could have been unaware of the risk he faced when it accepted Morocco’s assurances. Furthermore, it could not be unaware of the routine use of torture in Moroccan jails. As well as the horrific torture case involving former Guantánamo Bay prisoner Binyam Mohamed, other extraordinary torture rendition cases related to Morocco had emerged by then. Even Hollywood knew it: Morocco was strongly tipped to be the unnamed country in the 2007 film Rendition. Belgian lawyers for Ali Aarrass are now bringing a case against Spain before the HRC.

 

The extradition itself was secretive, with his family and lawyers only learning of his removal to Morocco through the press. Upon arrival in Morocco, Ali “disappeared” for 12 days, during which he was held by the police. He emerged bruised and battered, claiming that he had been beaten, subjected to sleep deprivation, injected with chemicals, raped, given electric shocks to his genitals, claims consistent with those made by many other prisoners in Moroccan jails. His Belgian lawyers have also brought a complaint against Morocco for an independent investigation into his torture claims. The Moroccan police, on the other hand, emerged with a signed confession to the charges in Arabic, a language he does not speak or read, evidenced by the need for an interpreter at his hearings. At his first trial, he retracted the confession, saying he had been forced to sign it. He is still subject to abuse in prison.

US prison conditions do not fare much better. In their case before the ECtHR, the Tooting Two argued that their extradition would be incompatible with their human rights under the European Convention on Human Rights, particularly Article 3 (prohibition on torture), as they would most likely be held at the Federal ADX Florence “Supermax” Prison if convicted; both face the possibility of a life sentence there. Described by a former prison officer as a “clean version of hell”, 360 prisoners are held at the administrative maximum facility (ADX), including some of the US’ most notorious convicts, in high-security conditions, tantamount to almost perpetual solitary confinement, sensory deprivation and “extreme isolation”, aimed at breaking prisoners down. This is par for the course in a country that deems torture to be an “enhanced interrogation technique” and in which the solitary confinement of prisoners is routine. One year ago, prisoners at the Pelican Bay Supermax Prison in California, home largely to violent gang members, started a hunger strike over conditions. Some prisoners have been in solitary confinement for over 20 years (the average is 8 at this jail), during which they have no contact with other human beings, including prison staff. This has been described by lawyers and prisoners as a cruel and unusual punishment. The mental health effects on prisoners, including depression, hallucinations, post-traumatic stress disorder and sometimes suicide are currently the subject of litigation with respect to Pelican Bay and ADX Florence. The surprise was the ECtHR ruling in April that such prison conditions would not be in breach of the two men’s human rights. For many campaigners, particularly in the US, it was felt that this politicised decision by the ECtHR gave torture, or at least cruel and degrading treatment, the green light, and international sanction of a harsh and inhumane regime. In spite of the ECtHR’s satisfaction with conditions in the US, following the extraditions, Amnesty International expressed its concerns and dismay at the ruling.

 

The UN Special Rapporteur on Torture Juan Mendez has intervened in both cases. In early October, his office wrote to the British government informing it that the extraditions would be in breach of the UN Convention Against Torture. Mr Mendez said, “I think there is very good arguments that solitary confinement and SAMs (special administrative measures, which impose severe restrictions on communication with other inmates or the outside world) would constitute torture and prevent the UK from extraditing these men.” He described such conditions as “arbitrary” and not “disciplinary”.

 

Juan Mendez visited Ali Aarrass in prison in Morocco just days before his appeal hearing started in September. He then issued a statement expressing his grave concerns about the use of torture in Moroccan jails, which he described as “systematic”. As a result, Mr Aarrass was threatened by prison staff. A report by Morocco’s official human rights body, the CNDH, last month revealed that most prisoners are subject to “cruel, inhuman and degrading treatment” without any effective investigations or inspections. At his hearing on 1st October, Ali Aarrass was supposed to be given an opportunity to talk about the torture he had faced. Following the reduction and not overturn of his sentence, Mr Aarrass’ lawyers are now appealing to the supreme administrative court (Court of Cassation) on a number of points of law.

 

Bargaining Chips”

 

In a forthcoming documentary about her brother, Ali Aarrass, Pour l’Exemple (English working title: Ali Aarrass: The Buck Stops Here), Farida Aarrass describes him as a “bargaining chip” in relations between the three states involved in his ordeal: Morocco, Spain and Belgium. The war on terror has indeed provided fertile ground for the burgeoning trade in human beings in diplomatic and commercial relations. A clear example of this was unearthed by HRW in Libya last year and is being investigated by the Metropolitan Police, concerning Britain’s direct involvement in the extraordinary rendition of Libyan dissidents in 2004. Shortly thereafter, trade relations were resumed with the Gaddafi regime, and attempts were made to deport other dissidents from the UK.

 

Cables leaked by Wikileaks demonstrate the clear awareness of various states of the torture evidence used in the Belliraj (terrorism ring) trials held in 2009, as well as concerns on how to deal with the abuses of rights and due process cited by lawyers and human rights NGOs. Less than a fortnight after ordering the extradition of the Tooting Two, Home Secretary Theresa May decided not to extradite Gary McKinnon, ending his almost decade-long fight, citing his Asperger’s Syndrome, also suffered by Talha Ahsan, as compromising his human rights and putting him at additional risk; this was ascertained not independently but by her own doctors. Home secretaries are not known for their compassion, as anti-deportation campaigners know too well. Clearly, a deal had been struck in Mr McKinnon’s case – who has suffered considerably – which was not reached in the case of the Tooting Two. The Home Secretary also announced changes, but the not much sought-after repeal, of the Extradition Act 2003. Much has been written about the unfairness in the two decisions in cases with striking similarities. Accused of racism and islamophobia, the test will come later this year when Richard O’Dwyer, not an Asperger’s sufferer, but also facing charges of online US offences committed in the UK, has his extradition hearing.

 

The United States and its intelligence agencies prefer to rely on their extrajudicial armoury, such as “extraordinary rendition” and fuzzy definitions of terms, such as “enhanced interrogation techniques” for “torture”. European states, on the other hand, continue to deny their involvement in such practices or that they collude in torture in any way. In the same way that the US outsources torture through such practices, European states are choosing to outsource justice in cases that would be problematic vis-à-vis the European Convention on Human Rights, particularly Article 3 (prohibition on torture), Article 5 (right to liberty and security) and Article 6 (right to a fair trial). An extradition involves a lawful “rendition” where a person is lawfully handed over from one state to another. European states are using legal mechanisms, such as extradition, to outsource justice, to states whose lower standards of proof and fair trials allow them to be tried in cases that could never be brought in Europe. This is clear in Ali Aarrass’ case having been thrown out by one of the strictest anti-terrorism judges in Europe. Other mechanisms exist too, such as the arbitrary deprivation of nationality and constraints on dual citizens, including Belgium’s own previous “double peine” regime, stripping dual nationals of their Belgian citizenship if convicted. The dehumanising and isolating effect of the war on terror, accusations of involvement in terrorist activity and the cult of secrecy shrouding “national security” concerns provide a comfortable blanket for governments worldwide. In the case of individuals like Ali Aarrass and the Tooting Two, it is truly the hard work of their families, lawyers and activists, who have refused to let matters go quietly or at all, that have thwarted official attempts to obscure such procedures, that are sometimes illegal, and have dragged the process on for years and beyond where the state parties involved may have liked.

 

There is something more sinister at play, however, perhaps best evidenced by the fact that a British company, Hiatts, once famous for manufacturing the shackles used to transport slaves across the Atlantic later produced shackles to transport prisoners to Guantánamo Bay. At the macro level, as governments around the world act like organised gangs, wilfully outside of the known confines of the law, enabling show trials and violating the absolute prohibition on the use of torture, and as extraordinary rendition and the war on terror have escalated over the past decade, so have other trades in human beings. At the micro level, this has opened the floodgates to the proliferation of people trafficking most often for domestic slavery and sexual exploitation, and debt bondage: slavery is well and truly alive in the twenty first century. Just a few weeks ago, the BBC reported that slavery, in its various forms is at its highest level ever. Criminal gangs trade in vulnerable people across borders and continents through extraordinary underhand deals in very much the same ways as governments, concealed by a code of silence.

Ali Aarrass, Pour L’Exemple will premiere on Sunday 11 November as part of the 12th Mediterranean Film Festival in Brussels. This is Armistice or Remembrance Day. Much has changed in the century since the “great war”: empires have risen and fallen, languages and technologies have evolved but history has a habit of repeating itself, and some stories remain the same.

 

Campaign actions:

 

Belgium:

 

http://www.freeali.be/2012/10/24/12-festival-cinema-meditarreneen-9-17-novembre-bruxelles-ali-aarrass-pour-lexemple/

 

Premiere of Ali Aarrass, Pour L’Exemple: 12th Mediterranean Film Festival, Sunday 11th November 2012, Rotonde, Brussels, 3pm

 

 

 

United Kingdom:

 

http://freetalha.org/2012/11/event-surviving-extradition/

 

Surviving Extradition: With Gary Mulgrew, Hamja Ahsan and Aviva Stahl, Friday 23rd November, 6.45-8.30pm, Abrar House, 45 Crawford Place, London W1H 4LP

 

 

 

http://freebabarahmad.com/the-story/latest-news/item/577-action-alert-write-to-the-foreign-secretary-british-ambassador-and-your-mp-regarding-continuing-isolation-of-babar-ahmad-and-talha-ahsan

 

Action alert: write to the Foreign Secretary, British Ambassador and your MP

« Abou Ghraïb au Maroc », un article de Taoufiq Bouachrine

dans DANS LA PRESSE/LA PRISON AU MAROC/ORGANISATIONS POUR LES DROITS DE L'HOMME / FOR HUMAN RIGHTS/TORTURE par

Quelle est donc cette capacité d’encaissement que possède Benhachem ? Et quel est cet aplomb que l’ancien collaborateur de Driss Basri à la Sûreté détient pour rester aussi impassible, ses nerfs comme placés dans un frigo, du début à la fin de l’audience du CNDH où il a entendu les pires choses sur les prisons dont il a la charge ?

 

Coups de bâtons et de tuyaux en plastique, « suspension » en l’air des prisonniers attachés avec des menottes, à la porte de leurs cellules, pendant de longues durées, coups de poings, brûlures, coups de pieds, dénudement intégral des détenus et exposition de leurs corps nus aux regards des autres, insultes avec les mots les plus orduriers et les plus méprisants et avilissants qui soient…

 

Que manque-t-il donc pour rebaptiser le Haut-commissariat à l’Administration pénitentiaire en Abou Ghraïb ? Ah oui, j’oubliais… il existe quand même une forme de torture qui n’est pas du tout appliquée dans les prisons de Benhachem : le harcèlement sexuel des prisonniers par des blondes et leur obligation à avoir des relations sexuelles avec elles, comme cela se produisait dans la sinistre prison d’Abou Ghraîb, en Irak…

 

Le rapport, dont la rédaction aura nécessité cinq mois d’enquêtes dans les différentes et nombreuses centrales d’arrêt au Maroc, n’a pas été élaboré par un organisme indépendant de défense des droits humains, pas plus qu’il n’est le fait d’une ONG ou institution internationale, ni même d’un organe d’opposition, mais bel et bien d’une institution officielle, dont le président et le SG ont été désignés par dahirs royaux… et c’est bien pour cela, surtout pour cela, que ce rapport terrible sur l’effrayante situation qui prévaut dans les prisons ne doit pas être rangé soigneusement dans un tiroir, et oublié, comme si de rien n’était.

 

Si le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a mis le doigt sur une plaie béante de notre société, cela aura permis de redonner un peu de crédibilité et d’indépendance à cet organisme né handicapé. Cependant, on peut également reprocher au CNDH de s’être arrêté en milieu de chemin en essayant de blanchir Benhachem de toute implication directe dans ce qui se produit comme traitements dégradants et humiliants, chaque jour, dans ses geôles, comme si c’étaient des êtres imaginaires qui dirigeaient ses prisons et officiaient dans leurs administrations.

 

Benhachem est juridiquement et administrativement responsable de qui se passe dans une institution qu’il dirige de la manière la plus directe qui soit, dont il nomme les directeurs et responsables des centrales d’arrêt et où il prend toutes les décisions. Le seul chose qui lui reste à faire est de présenter sa démission et de s’en aller. Immédiatement. Et le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, est également responsable sur les plan juridique, politique et même (et surtout) moral sur ces faits qui se produisent dans les prisons du royaume, car le Haut-commissariat à l’Administration pénitentiaire relève de la présidence du gouvernement. Quant à Mustapha Ramid, le ministre de la Justice, il est à son tour responsable, et lui aussi, sur les plan juridique, politique et même (et surtout) moral et, de ce fait, il lui appartient d’ordonner l’ouverture d’une instruction judiciaire sur les faits rapportés par le rapport du CNDH ; son ministère doit reprendre les points de ce rapport et interroger les responsables en garantissant les protections légales aux témoins afin de les protéger et les prémunir contre toute vengeance des accusés… accusés de tortures et de mauvais traitements…

 

Par ailleurs, la torture dans les prisons revêt plusieurs formes. Ainsi, en plus des comportements sadiques de certains responsables et gardiens de prisons, il y a aussi le problème de la surpopulation carcérale (65.000 détenus pour une capacité de 30.000 places) ; et puis, les prisons au Maroc n’assurent pas le minimum alimentaire à leurs pensionnaires puisqu’il est admis qu’un prisonnier coûte quotidiennement 20 DH à l’Etat, une somme englobant son alimentation, en plus des dépenses d’eau et d’électricité ; le budget des dépenses des prisons, au niveau national, ne dépasse guère 556 millions de DH annuellement, et leur budget global pour 2013 sera de 2,2 milliards de DH, avec une augmentation de seulement 200 millions de DH par rapport à l’année passée. Cela est nettement en-deçà des besoins… et si l’Etat se montre ainsi incapable de s’occuper de 65.000 citoyens dans des conditions humaines décentes, comment pourrait-on attendre de lui qu’il prenne en charge les 34 millions d’autres personnes, qui vivent à l’extérieur des murs des prisons ?

 

Comment donc le chef du gouvernement peut-il manger, boire et dormir alors que dans tous les coins et recoins des prisons et pénitenciers du royaume, des êtres humains vivent dans des conditions moyenâgeuses, torturés, battus, humiliés, brûlés ?… Il s’agit là d’une véritable marque d’infamie sur le front des responsables de ce gouvernement, et plus généralement de tout responsable de ce pays qui peut faire, qui peut dire, qui peut dénoncer… et qui se tait… La moindre des choses que pourrait faire Benhachem est d’envoyer Benhachem en retraite et de réviser cette pratique, cette erreur, consistant à faire appel à cette ancienne mentalité, dépassée et renfermée sur elle-même, pour diriger les prisons du royaume.

 

Votre silence, Messieurs, ne fait que prolonger l’existence de ces prisons de la honte !

 

 

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