La protection consulaire pour Ali Aarrass : Question parlementaire de Zoé Genot à Didier Reynders (11 mars 2014)

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 anti_torture« Soutien de la Belgique à Ali Aarrass : Magré l’obligation du tribunal, toujours rien ! »

 Zoé Genot : La ministre parle de futures « communications » entre le consul et le concerné. Sa « situation est satisfaisante », le ministre le sait via son homologue marocain. Lui a-t-il aussi confirmé les faits de torture établis par l’ONU ? Cessons de jouer, il s’agit de la vie d’un homme .

 [Chambre des représentants – Commission des Relations extérieures – Réunion du 11 mars 2014 – Extrait du compte rendu intégral (CRIV 53 – COM 0945)]

 04 Question de Mme Zoé Genot au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes sur « l’étendue de la protection consulaire de l’État belge aux citoyens belges détenus à l’étranger » (n° 22164)

 04.01 Zoé Genot (Ecolo-Groen) : Monsieur le président, monsieur le ministre, le cas de M. Ali Aarrass, ressortissant belge torturé, condamné iniquement et détenu au Maroc a déjà été évoqué à plusieurs reprises. Permettez-moi d’y revenir une nouvelle fois.

 Au cours de la séance de la commission des Relations extérieures du 29 janvier 2014, vous avez indiqué que rien ne vous empêchait d’intervenir dans un cadre humanitaire.

 Pourriez-vous indiquer quelle différence vous faites entre protection consulaire et protection humanitaire ? Pourriez-vous expliquer pour quelle raison vous n’intervenez pas en termes humanitaires en faveur de M. Aarrass ? Dans un tel cas, vous paraît-il approprié, raisonnable ou judicieux de vous fier totalement à ce que vous a indiqué votre homologue marocain, alors même qu’il s’agit d’un membre du gouvernement qui a fait torturer Ali Aarrass ? Ses propos vous paraissent-ils crédibles ? Justifient-ils la fin de votre intervention ?

 Au cours de cette même séance, vous avez réaffirmé refuser d’assurer la protection consulaire à M. Aarrass, justifiant votre position par la Convention de La Haye. Le tribunal de première instance siégeant en référé vient de rendre une ordonnance exposant : « La protection consulaire vise principalement la protection des droits individuels à l’étranger. Elle doit être entendue comme un mécanisme visant à ce que les droits reconnus à un individu puissent être effectivement garantis (…). La protection consulaire est donc de nature à contribuer au respect des droits fondamentaux, comme celui garanti à l’article 3 de la Convention européenne des Droits de l’homme (…). Un agent consulaire a le droit de communiquer avec son ressortissant mais ce droit peut se transformer en obligation (…). L’article 4 de la Convention de La Haye (…) ne règle pas les droits des parties au litige puisque le Maroc n’a pas ratifié ladite Convention (…). Prima facie, il n’existe aucune règle de droit international qui contraint l’État belge à ne pas intervenir dans le cas d’un binational (…). »

 Le tribunal vous a enjoint d’accorder l’assistance consulaire à M. Aarrass. Quelles sont les instructions que vous avez adressées à notre poste diplomatique et consulaire à Rabat pour mettre à exécution la décision judiciaire du 3 février 2014 ? Selon quelles modalités concrètes l’assistance consulaire belge sera-t-elle apportée à notre compatriote ? Dans quel délai ? Avec quelle fréquence ? Pendant combien de temps, etc. ? Quelles sont les facilités que vous avez obtenues des autorités marocaines pour donner à cette assistance consulaire sa pleine efficacité ?

 04.02 Didier Reynders, ministre : Monsieur le président, madame Genot, l’assistance consulaire est plus étendue que l’assistance humanitaire. Elle pourrait comporter entre autres des visites au détenu, l’aide dans le choix d’un avocat, des contacts avec la famille du détenu. L’assistance humanitaire peut également s’exercer pour une personne qui n’a pas la nationalité belge, par exemple en cas de non-respect des droits de l’homme, ce que nous faisons dans un certain nombre de cas à travers le monde.

 Dans ce cadre, je suis intervenu pour M. Ali Aarrass en août 2013 après sa grève de la faim. À la suite de cette intervention, il a été confirmé que la situation de M. Aarass était satisfaisante. Je parle des conditions de détention.

 Les propos de mon homologue marocain me paraissent crédibles étant donné qu’ils ont été confirmés par le Conseil national des Droits de l’homme marocain, organisme indépendant, qui a en outre envoyé des représentants rendre visite à M. Aarrass. Des suites ont donc été données à cette intervention humanitaire.

 Pour ce qui est de l’ordonnance du tribunal de première instance de Bruxelles, outre le fait que nous avons interjeté appel car nous ne partageons pas du tout l’analyse sur deux points de droit, cette ordonnance stipule que M. Ali Aarrass doit pouvoir, s’il en fait la demande, communiquer avec le consul belge sur place. Instruction a été donnée à notre ambassade à Rabat de mettre M. Aarrass en mesure de communiquer avec l’ambassade. En fonction de ses doléances, il sera examiné avec quelle fréquence cette communication devra avoir lieu.

marathon Sarah debout  04.03 Zoé Genot (Ecolo-Groen) : Monsieur le ministre, je suis étonnée par la fin de votre réponse.

 Je savais que vous aviez fait appel. J’ai lu le jugement du tribunal de première instance. Pour moi, il était clair que M. Aarrass devait recevoir une assistance. Dire qu’on va s’arranger pour mettre en place une communication me paraît peu respectueux de l’ordonnance. Je suis étonnée que rien n’ait encore été fait. Cela signifie qu’outre le fait de devoir aller en justice, il faut prévoir des mesures exécutoires pour forcer l’État belge à exécuter les jugements des tribunaux belges, que ce soit l’esprit ou la lettre de ces décisions !

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