Category archive

Lettres/Letters/Brieven

« Lovebirds : le déclic a été une lettre de prison d’Ali Aarrass ». Une interview de Philippe et Arthur Tasquin par Claude Semal (asymptomatique.be)

dans ACTIONS/ARTS/LA PRISON AU MAROC/Lettres/Letters/Brieven par

SOURCE

J’ai connu Philippe Tasquin quand il était encore un bébé-Maurane dans la région verviétoise. Je crois même avoir été là le jour où il rencontra Isabelle Lamouline, la maman d’Arthur, à une terrasse fraîche et mousseuse devant l’Espace Delvaux. Bruxelles est un grand lit.
Ce surdoué de la musique a fait depuis trente ans une carrière de chanteur « à la belge », en passant sous le radar des grands médias, tout en développant parallèlement ses qualités d’instrumentiste, de compositeur et d’arrangeur.

Il tourna plusieurs saisons en duo avec Vincent Trouble, en solo ou avec un quatuor à cordes, et fut notamment le « chef d’orchestre » de tous les spectacles musicaux de Charlie Degotte. Il a composé récemment, au Théâtre du Parc, la musique d’une comédie musicale autour du Livre de la Jungle. Depuis plusieurs années, pour faire bouillir la marmite, il prête aussi sa voix, dans les studios de doublages, aux dessins animés les plus schroumphants. Allez-visiter ci-dessous le CV, le site et le parcours de cet homme-orchestre : vous serez bluffé.

« Lovebirds » est une magnifique réalisation père-fils, un vidéo clip fait maison, un chef d’oeuvre du confinement « made in Saint-Josse ». N’hésitez pas à le partager sur les réseaux sociaux (il y a un bouton à la fin de l’article justement fait pour cela).

Claude Semal, le 24 mars 2021.

Claude : Je connais assez bien le travail de Philippe. Mais toi, Arthur, ton parcours, c’est quoi ?

Arthur : Je suis infographiste 3D. J’ai étudié à Albert Jacquard, une école de graphisme à Namur. Trois ans en 3D, plus une année de spécialisation en jeux vidéo. Pour notre travail de fin d’étude, on avait coréalisé un clip à trois, avec deux autres élèves, dont mon père avait déjà fait la musique. C’est donc notre second travail en commun, mais le premier réellement en duo.

Claude : Tu n’as même pas fait un petit stage en Californie ?

Arthur : Non, non, j’ai tout appris en Belgique.

Claude : Philippe, tu chantes en anglais, mais mon anglais se limite à la lecture des modes d’emploi sur les paquets de cigarettes. Et en plus, je ne fume pas. Explique-nous ce que tu as voulu dire dans cette chanson… ?

Philippe : Le point de départ… C’est une chanson d’amour pour ma compagne. Et ce thème musical, en forme d’aria d’opéra, m’est venu naturellement sous les doigts, plutôt lancinant et pesant,… bref, tout le contraire de notre relation (rires).
Je me suis demandé comment concilier le thème et ma chanson d’amour, et le déclic a été une lettre de prison d’Ali Aarrass, un belgo-marocain qui a la double nationalité, et qui a été emprisonné douze ans dans une geôle marocaine. Dans des conditions atroces, parce qu’il était suspecté de terrorisme. Il a été lavé de tout soupçon, mais il a passé douze ans en prison. Et la Belgique n’a pas sorti le petit doigt pour le sortir de là, il n’a même pas bénéficié de l’assistance consulaire. Sa lettre m’a bouleversé : Il demande qu’on lui rappelle ce que signifie la liberté et la justice, car lui ne sait plus ce que c’est…

Claude : Bref, tout ce qu’il faut pour faire une chanson d’amour… (rires).

Philippe : Tu l’as dit ! Tout s’est un peu mélangé. J’ai imaginé la situation d’un gars en prison qui s’adresse à son amour. Qui pouvait aussi être, allégoriquement, la prison intérieure que nous portons souvent en nous. Il lui demande de raviver ses souvenirs de liberté, de la sensation d’une étreinte…Elle se matérialise sous la forme d’ailes blanches pour le délivrer. Puis j’ai terminé cette chanson juste avant le confinement. Elle a alors immédiatement pris une signification différente, plus collective et plus universelle. Un cri d’amour dans une société inhumaine. Ce qui est dingue c’est que Ali a été libéré au milieu du premier confinement. C’était comme si le monde entier se transformait en prison. C’était une situation absurde et cauchemardesque et qui convoquait une foule d’images.
Bref, j’en ai parlé à Arthur, qui a amené son propre univers, plus anxiogène, qui évoque une société dystopique de surveillance généralisée, où chacun est captif et seul. C’est pour cela que j’ai tenu à citer aussi Assange dans le générique qui nous a alerté sur cette dérive, et qui, c’est le moins qu’on puisse dire, en paie le prix.
Maintenant après avoir dit ça, je me rends compte que rien n’est explicite, et je constate autour de moi que certains y voient d’autres choses, qui leur appartiennent. Il y a plusieurs lectures et ça me plaît.

Claude: Arthur, comment traduit-on visuellement une idée ou une chanson ? Tu sembles avoir imaginé un monde-univers, une identité graphique forte, qui évoque un peu un « niveau » dans un jeu vidéo. Qu’est-ce qui t’a inspiré cela ?

Arthur : J’ai été influencé par plusieurs œuvres qui entraient en résonance avec mes premières semaines de confinement. Le film « Blade Runner », ou un jeu vidéo qui s’appelle « Contrôle » ont été une grande source d’inspiration pour moi. Ces deux œuvres transmettent des émotions fortes par l’image, et qui s’adressent je crois à tout le monde.

Claude : Techniquement, comment as-tu procédé ? On part de croquis, des dessins, de photographies, et on les anime ? Ou bien de formes numériques préformatées qu’on adapte au sujet ?

Arthur : C’est un peu un mélange de tout. La 3D, c’est à la fois très technique et très artistique. Comme on crée des images en mouvement, il faut avoir une vision artistique des formes, des couleurs, de la composition, du montage… Dans ce clip-ci, il y a 29 plans. Cela prend énormément de temps. On utilise donc des tas d’outils informatiques pour ne pas devoir redessiner chaque petite feuille. On imagine souvent la 3D comme un truc très obscur où tu dois encoder des lignes de chiffres et de lettres pour créer du visuel. C’était peut-être comme ça au début de l’infographie lorsqu’on avait encore du mal à afficher un cube à l’écran. Aujourd’hui, c’est plus intuitif, on utilise beaucoup de logiciels graphiques, de banques d’images, on part de formes simples qu’on complexifie et qu’on personnalise peu à peu.

Philippe : Je fais un peu la même chose avec le son, je mélange des banques de « samples » orchestraux très sophistiqués, à la recherche de la bonne articulation, de la bonne perspective. Quelquefois je mélange avec des sons acoustiques. Ici tout est programmé, sauf la voix, seul élément « physique » dans ce monde numérique. Mais ça reste de l’artisanat. Et à la base le travail d’écriture et de composition reste le même.

Claude : quel effet cela vous fait, d’avoir travaillé en duo père-fils ? Ca n’arrive pas si souvent que cela.

Arthur : Cela marque une étape, c’est vraiment quelque chose qu’on a fait à deux. On est fier d’avoir fait ce travail « en famille » (rires).

Philippe : C’est une sensation formidable cette collaboration musique et images, père/fils. Je suis vraiment fier qu’Arthur ait été au bout du processus. C’est parfois très éprouvant de travailler seul, de trouver la motivation. J’ai été vraiment bluffé par le résultat. C’était fascinant pour moi de littéralement « voir » ma musique. Je ressens paradoxalement quelque chose de très pur dans cette mise en images numérique. Et puis je me suis dis que j’avais été finalement bien inspiré de lui faire découvrir « Brazil » et « 2001, l’Odyssée de l’Espace » quand il était tout petit (rires).

Claude : Tu sais à quoi cela m’a fait penser ? Au « chef d’œuvre » des Compagnons du Tour de France, qui vont se former un peu partout chez des artisans, et qui pour « coiffer » la fin de leur formation, réalisent une pièce technique particulièrement réussie, pour montrer leur savoir-faire, et annoncer leur entrée dans la vie active. Pour toi Arthur, ce clip, c’est une sorte de carte de visite ?

Arthur : Oui, mon but, c’est quand même d’aller travailler à l’étranger dans une boîte de jeux vidéo. Pour présenter mon travail, c’est évidemment une belle pièce dans un « book ». Tu sais, pour trouver du travail, quand je suis sorti de l’école, j’ai passé six mois à développer mon propre jeu vidéo. Mais c’est très compliqué de se lancer seul. En Belgique, surtout en région wallonne et à Bruxelles, on a de bonnes écoles, mais par rapport à d’autres pays, les studios de jeu vidéo ne sont pas assez développés. Et quand Ils engagent, ce ne sont pas des « jeunes » qui sortent des écoles, mais plutôt des « seniors », avec de l’expérience.

Philippe : Tu sais, pour moi aussi, c’est une carte de visite … C’est une autre façon de faire entendre ma musique. Et il y a aussi de la musique dans les jeux vidéo ! Tu le sais, notre secteur musical est complètement sinistré, et encore plus avec le COVID. Il faut reconnaître que la numérisation, le streaming, ont en quelque sorte dévalorisé la musique. Sortir un album ne constitue malheureusement plus un événement.
Alors que le binôme image-musique, cette forme relativement nouvelle, dans les clips et les jeux vidéo, garde quelque chose d’assez excitant, d’encore novateur. Cela peut donc nous ouvrir des portes, élargir notre champ de travail. Il faut trouver de nouvelles formes.

Claude : Bon, merci beaucoup, les gars. Vous le savez, l’avantage d’un webmagazine sur un « bête » journal, c’est qu’on peut publier du son et des images. N’hésitez donc pas à nous envoyer tout ce qui peut être partagé.

Philippe : Je voulais encore te dire qu’on a reçu un mot d’Ali Aarrass, qui avait été très touché par la chanson.

Claude : Génial.

Philippe : On va certainement se voir. Son combat pour la justice ne fait que commencer.

Lovebirds, by Philippe et Arthur Tasquin, a song and artwork for the prisoners (Ali Aarrass, Julian Assange and all the others)

dans ACTIONS/ARTS/DANS LA PRESSE/Evénements/Lettres/Letters/Brieven par

Lovebirds is a collaboration between a father and a son who wanted to create something together. This project is about the loneliness and pain of being far from our loved ones. It explores a dystopic society where everyone is captive and separated.
For optimal viewing experience, please watch this clip at full screen in 4K with ample sound.
For more visuals and in depth breakdown, please visit :
artstation.com/arthurtasquin

LYRICS
My love my darling
I hear you crying
Behind the walls
From the dark world of shadows

I’m such a long time in prison
Waiting for another season
Now it’s time to free
The blackbird inside me
And let it go…

Whispering in the breeze
What it’s like to be free
How it feels to be home in your arms
Run the earth
Touch the sky
And then send back to me
All those precious memories

Could it be some delusion
Now I see in a vision
White wings take shape in the moon
White wings approach
And fly me away

CREDITS
A song by Philippe Tasquin
Directed by Arthur Tasquin

LINKS
Philippe Tasquin
_____________________________________________________
youtube.com/channel/UC6EtqaQMOJmPNNhB3qV112Q

Arthur Tasquin

Le 4 mars, c’est l’anniversaire d’Ali Aarrass. Souhaite-lui un bon anniversaire !

dans ACTIONS/Lettres/Letters/Brieven par

Le 4 mars 2019,  Ali Aarrass aura 57 ans. Il avait 46 ans lorsqu’il fut arrêté. Ecrivez lui un mot d’encouragement et de motivation afin que la dernière année de sa détention devienne moins longue.

Merci !

Adresse :  Ali Aarrass, numéro d’écrou 930
Prison locale de Tiflet 2
Tiflet
Maroc

Merci de participer à la campagne « Rompons l’isolement : 12 voyages pour Ali Aarrass« , cliquez ICI

Le jeudi 22 juin, Manu Scordia et Farida Aarrass présenteront leurs livres sur Ali Aarrass, avec Mohamed Aadel (Le Space 18-20h).

dans ACTIONS/ARTS/Evénements/Lettres/Letters/Brieven par

Le 22 juin au SPACE, Manu Scordia et Farida Aarraass présenteront leurs livres : 
-La bande dessinée « Je m’appelle Ali Aarrass » (Manu Scordia)
-Le livre « Lettres de prison et Journal d’une grève de la faim » (Ali Aarrass et Farida Aarrass)

Ces deux récits, relatent l’affaire du belgo-marocain Ali Aarrass, incarcéré et torturé au Maroc dans l’indifférence de la Belgique alors que son innocence est établie.

Dans Journal d’une grève de la faim, sa sœur Farida nous entraîne dans le monde carcéral, et nous parle des familles des détenus qui elles aussi vivent la prison. Oscillant entre souffrance, désespoir et résistance pendant la sixième grève de la faim de son frère, elle lance un appel contre l’indifférence et la peur.

Le livre de Manu Scordia est une bande dessinée en noir et blanc qui raconte la vie d’Ali Aarrass. Il retrace le parcours de cet homme: son enfance à Melilla, sa venue en Belgique, ses différents boulots, son arrestation puis les mauvais traitements, l’extradition, la torture, le procès inique…

L’affaire Ali Aarrass nous éclaire sur les dérives honteuses et inquiétantes de la guerre au terrorisme et du tout-sécuritaire.

Retour aussi sur la situation actuelle au Maroc, avec Mohamed Aadel.

Quand ? Jeudi 22 juin 2017 de 18h à 20h

Où ? Le Space, Rue de la Clé 26 Sleutelstraat, 1000 Bruxelles

Evénement Facebook : cliquez ICI

Bon anniversaire Ali ! On ne t’oublie pas !

dans ACTIONS/Lettres/Letters/Brieven par

Ce samedi 4 mars 2017 est l’anniversaire de mon frère Ali Aarrass.

Il aura 55 ans.

Cela fait 9 ans qu’il est en détention arbitraire, il avait 46 ans lorsque le cauchemar commença.

Si vous voulez lui écrire une lettre ou une carte postale pour lui souhaiter non pas un joyeux anniversaire, car en aucun cas il ne pourra l’être, mais plutôt pour l’encourager, le motiver à résister encore et encore… Lui dire des mots qui lui feront du bien tout simplement. Ses conditions de détention actuelles sont les plus horribles qu’on puisse imaginer. Puis je compter sur votre soutien ?!

Ali Aarrass, numéro d’écrou 930
Prison locale Tiflet 2
Tiflet
Maroc

Je vous remercie !!!

Farida Aarrass

 

« Une carte en couleur pour Ali, parce que la prison c’est juste du noir et du gris… »

dans ACTIONS/Lettres/Letters/Brieven par

Carte colorée pour Ali Aarrass

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ALI AARRASS *

في عالم ملغم بسياسات القهر و الموت الحكومي و الغير
الحكومى. لا يسعني إلا أن احتفظ على جزء من إنسانيتى و ارسل كل أسبوع رسالة إلى السجين علي اعراس رقم 930 سجن تفلت المغرب. ابن هدا المهاجر دو الجنسية البلجيكية و الإقامة الاسبانية يقيم بسجن انفرادي منذ أكثر من 8 سنوات. الدول الاروبية تركته غنيمة و لم تعطيه الفرصة اللدفاع عن نفسه. العائلة في مليلية المحتلة و المغرب و بلجيكا قدمت طلب لعفو من الملك. اتمنا أن يستجيب الملك لهذا الطلب.
سهيل ساعدني في اختيار البطاقة  » بابا السجن كله عتمة و السجين بحاجة إلى ألوان  » رجاء ا كاتبوه

930, c’ est le no de Ali Aarrass dans la prison de Tiflet.

Écrivez lui pour qu’ il garde espoire dans les consciences libres de notre pays . Le père de Ali est très soufrant. Espérons qu’il puisse revoir son fils. La famille lance une demande de grâce royale, espérons que le roi mettra fin à cette souffrance.
Souhail à choisi cette carte pour Ali  » les couleurs c’est important car la prison c’est juste du noir et du gris. »
Bonne nouvelle : la famille à eu 2h d’échange avec Ali. Avant ils faisaient le déplacement pour 30 mn . Farida la soeur de Ali, nous confirme qu’il « REÇOIT LES LETTRES ET CARTES » . Alors écrivez.

Youssef 

* Voir Je m’appelle Ali Aarrass de Manu Scordia et lettres de prison de Farida et Ali Aarrass www.antidote.be

« J’ai pris ses mains glacées dans les miennes », lettre de Houria, la femme d’Ali Aarrass, sur sa visite à son mari à la prison de Tiflet 2

dans Lettres/Letters/Brieven par

Houria, la femme d'Ali AarrassSalam Farida,

Voici comme promis le compte rendu de la visite à Ali, ce lundi 2 janvier 2017.

Après de longues heures de route et d’impatience…. à travers le Maroc…de Melilla à Tiflet, nous sommes enfin arrivés à 12h30. J’étais accompagnée de Famma, l’épouse de ton père et de son frère Allal. Allal qui a toujours été là pour nous amener et nous ramener à travers ces très longs chemins, sans jamais émettre la moindre plainte, est obligé de rester dehors. Il n’a pas le droit de voir Ali, mais pour lui, le fait que nous puissions nous le faire, est déjà une grande récompense.

Le fonctionnaire qui se trouve à la porte m’a reconnue immédiatement. 
Avant même que je ne dise le nom de mon mari, Ali Aarrass, le voilà qu’il me devance et le dit à ma place. Il nous demande de bien vouloir attendre un peu car Ali avait déjà une visite….que j’ignorais. L’un de ses avocats s’entretenait avec lui. Nous avons donc patienté une demi heure et c’était à notre tour d’y aller. Il est donc 13 h lorsque ce même fonctionnaire est venu nous chercher. Nous avons croisé l’avocat, qui n’a pas voulu nous retarder et après nous avoir salué et échangé quelques mots, s’en alla.

Après avoir examiné tout ce qui est administratif, on a enfin pu passer par la fouille des affaires qu’on lui a apporté. Je lui avait apporté entre autre, deux couvertures, car ils avaient permis aux familles d’en apporter pour l’hiver et à celles ci de les récupérer après cette saison froide. Malheureusement, celles que j’ai apporté à Ali, ils me les ont refusées. Ils disent qu’elles ne répondent pas aux critères demandés. J’en ai eu le coeur gros de savoir qu’après cette tentative Ali n’aura pas plus chaud.
Ils m’ont montré un modèle, je veillerai à les lui ramener dès ma prochaine visite. 
Tant qu’il est soumis à un tel isolement, j’ai l’intention de lui rendre visite au moins une fois par mois, afin de lui apporter un maximum de réconfort. J’aurais tellement aimé le voir plus souvent, mais comme je dois compter sur d’autres personnes pour y aller, c’est un peu compliqué.

Ensuite on nous indiqué la salle de visite. En y arrivant j’aperçois deux familles avec leur proche détenu. 
Dans un coin il y avait deux gardiens assis à une table pour la surveillance.
Famma et moi nous sommes installées à une table. 
Un peu plus loin, il y avait un un jeune couple avec leur petite fille. 
Dès que la petite fille m’a aperçue, elle est venue à notre table. Elle voulait que je la prenne dans mes bras. Je l’ai prise et elle a mis ses bras autour de mon cou et n’arrêtait pas de m’embrasser. J’étais très surprise par toute l’affection que cette petite me donnait. Famma regardait la scène d’un air on ne peut plus étonné. Son père l’appelait mais celle ci refusait de les rejoindre à leur table. 
Son père avait un accent français sûrement qu’il était d’origine française. Je me suis donc mise à parler avec cette adorable petite fille qui parlait le français. Elle s’appelait Mimouna et avait 4 ans. Elle me disait qu’elle voulait rester avec moi, qu’elle serait très sage et n’allait pas pleurer. Je lui ai demandé d’aller profiter de ce moment avec son papa mais rien à faire. La voilà qui me dit, que sa maman n’arrêtait pas de pleurer. Ça m’a fendu le coeur car je comprends très bien la situation. Cette petite ne comprend pas encore où se trouve son père, elle représente l’innocence même.

Soudain, Ali vient d’entrer dans la salle et se dirige vers nous. La petite le voit et se précipite vers lui. Ali était surpris par l’attitude si douce de ce petit ange. 
Je lui ai expliqué que ses parents étaient à l’autre table mais rien n’y faisait, elle préférait rester avec nous. 
Il a du la poser sur une chaise pour pouvoir nous serrer fort dans ses bras. 
Il me dit que la situation est toujours la même, que rien n’a changé Il est toujours en isolement total. Aucun contact humain. 
Pendant qu’il raconte je prends ses mains dans les miennes. Elles sont glacées ! 
Je vais les garder entre les miennes pour essayer de les réchauffer.

Il me parle de son état de santé, qu’on lui a fait faire des examens chez un urologue.
Qu’on lui a prescrit un traitement car le médecin lui a dit qu’il avait une inflammation. 
Je lui ai demandé comment il gère ses moments de solitude. 
Il me répond qu’il lit beaucoup. Il dessine. Il écrit. 
Il pense beaucoup à sa famille et aux personnes qui le soutiennent. Leur courrier lui permet de renforcer son moral. Il est très touché par le nombre de personnes qui le soutiennent et le motivent par l’envoie d’une lettre, une carte postale, les magazines, des livres… Il m’a dit de bien remercier toutes ces personnes qui pensent à lui. 
Pendant que Ali parlait je l’observais et ai remarqué qu’il a maigri depuis la dernière fois que je l’ai vu. Cela ne fait pourtant qu’un mois. 
La nourriture qu’on lui donne n’est pas terrible mais en plus il n’a pas eu droit aux extra depuis un moment déjà. 
Il mange pour subsister…
Je lui apporté pleins de fruits pour qu’il ait au moins un peu de vitamines et de l’énergie. 
Chaque fois qu’on viendra le voir, on va l’approvisionner en fruits. 
 Une visite par mois, lui fera le plus grand bien je pense.

Le papa de la petite Mimouna l’appelle. C’est l’heure de partir avec sa maman. Elle nous fais à tous un gros bisou avant de partir.

Ali me dit que c est un vrai petit ange dans cet endroit funeste. 
On est resté les derniers, on a profité de chaque minute. Famma lui a donné des nouvelles de toute la famille. 
Alors que lors de la dernière visite nous n’avions eu droit qu’à une demi heure de temps, voilà que cette fois ci le temps s’écoule sans qu’on y prête attention et sans le réaliser, nous avons passé presque deux heures en sa compagnie.

C’était comme si tout s’arrêtait autour de nous. 
Des moments de bonheur intense, même dans de telles conditions. 
Famma et moi avons fait tout notre possible pour lui transmettre un maximum d’ondes positives et ainsi le renforcer aussi bien moralement que physiquement.

Je n’oublierai pas cette journée si particulière. 
Cette petite Mimouna qui a contribué malgré elle à nous faire presque oublier l’endroit lugubre où l’on était… 
Comme l’a dit Ali un vrai petit ange … 

Houria, épouse d’Ali Aarrass

Manu Scordia et Farida Aarrass à la librairie Par Chemins à Forest (jeudi 15 déc 19.30h)

dans ACTIONS/ARTS/Lettres/Letters/Brieven par

farida-aarrass-et-manu-scordiaConférence/débat/discussion autour des 2 livres sur Ali Aarrass:
la bande dessinée « Je m’appelle Ali Aarrass » de Manu Scordia et le livre « Lettres de prison et journal d’une grève » d’Ali Aarrass et Farida Aarrass.
A l’heure du tout-sécuritaire, d’un virage à (l’extrême) droite et de l’explosion du racisme le plus décomplexé, quelles perspectives pour Ali Aarrass et pour les binationaux?

Débat, discussions et témoignages en présence de

– Farida Aarrass, soeur d’Ali Aarrass et co-auteure du livre « Lettre de prison »
– Manu Scordia, auteur de la bd « Je m’appelle Ali Aarrass »

Où ? Librairie Par Chemins, Rue Berthelot 116, 1190 Forest

Quand ? Jeudi 15 décembre 2016 à 19.30h.

Le cri d’alarme de Houria, la femme d’Ali Aarrass : les conditions de détention d’Ali sont inhumaines !

dans LA PRISON AU MAROC/Lettres/Letters/Brieven par

Houria la femme d'AliDans une lettre à Farida Aarrass, Houria, la femme d’Ali, raconte sa visite à son mari le 8 novembre 2016.

« Je te résume la situation dans laquelle est Ali à l’heure actuelle. Il m’a demandé à ce que je t’en parle, mais insiste pour que tu ne t’inquiètes pas pour lui.

Il est enfermé dans cellule 23h/24 dans un long couloir où il y a plus de 30 cellules, toutes vides. Son lit est en béton. On lui a remis 2 couvertures militaires toutes fines. Celles qu’il avait avant, il a du me les remettre car interdites, ainsi que les draps et tous les objets qui lui servait pour cuisiner. Ainsi que les réserves qu’il avait encore en pâtes, café, infusions…

En plus de ça tout ce que je lui ai apporté, lui a été interdit, ils me l’ont donc rendu. Exception faite des fruits, des cahiers et bics.

Dans cette prison le régime est très stricte, l’unique chose que peuvent apporter les familles est la nourriture préparée et les fruits. C’est apparemment la même chose pour tous les détenus dans cette prison. C’est du moins ce qu’ils disent.

J’ai demandé à un fonctionnaire comment c’était possible et il m’a répondu que tout ce que nous apportons peut être acheté dans le magasin qu’ils ont à l’intérieur de la prison. Je ne sais pas s’il faut vraiment croire cela, j’ignore à quel moment Ali pourrait s’acheter quoi que ce soit alors qu’il est enfermé 23h/24. Mais nous veillerons à renflouer autant que possible en argent, son compte à l’économat de la prison.

Il a droit à 1 heure de promenade toujours tout seul. Il en profite pour faire un peu de sport, pour se maintenir tant bien que mal, en forme.

Il a demandé au directeur la raison de son transfert à cette prison. Il a répondu que l’ordre vient du chef pénitentiaire. Mais dès qu’il a eu l’opportunité, il a posé la même question à un coordinateur qui lui répond que l’ordre vient de plus haut.

Ali dit ne pas savoir qui croire ????

Il a demandé combien de temps va durer cette situation inhumaine. Combien de temps il va encore être ainsi traité ?

Nourriture abjecte fournie sans échange, pas le moindre mot. Privation de tout contact humain et cela même lors de son heure de préau !

Tout est fait de façon à ce qu’il se retrouve tout le temps seul !

De quoi lui rendre fou !

Dès qu’il a eu l’occasion, il leur a fait savoir que s’il lui arrivait quoi que ce soit, ils seraient responsables.

Dans la nuit du vendredi à samedi, il a été pris de sueurs froides, chaudes et lorsqu’il s’est levé a été pris de vertiges et a vomis du blanc. Il a paniqué et a crié de toutes ses forces pour alerter le garde, qui étant trop loin ne l’entendait pas.

Ces derniers temps (cela avait déjà commencé à Salé 2) il est souvent pris de vertiges et il lui arrive de perdre conscience. Il leur a fait comprendre qu’il a souvent des vertiges et qu’il tombe, mais aucun retour. A Salé il avait déjà vu un médecin pour cela : vertige, vomissements, du mal à uriner. Il l’a fait savoir au médecin dans la prison actuelle.

D’ailleurs la nuit du vendredi à samedi il est tombé, il n’a pas arrêté de crier pour qu’on vienne le voir, sans réponse. Il est resté un long moment espérant qu’on vienne. Il a crié encore et encore de toutes ses forces et enfin est apparu un gardien qui l’a emmené à l’infirmerie.

C’est suite à cela qui s’est plaint des conditions dans lesquelles il est. Il avait demandé à voir le directeur cette semaine on va voir s’il va le recevoir.

Ali demande qu’un Comité des droits de l’homme vienne le voir et raconter sa situation alarmante avant que son état n’empire.

Il continue à espérer la visite du consul belge. Je lui ai dit qu’il y a une pétition qui circule pour récolter le maximum de signatures pour qu’il puisse avoir une visite consulaire.

Depuis qu’il est là, il y a eu 4 fouilles !!!! Des fouilles inutiles pour lui puisqu’il n’a aucun contact et donc jamais ils n’auraient à trouver quoi que ce soit de nouveau !!!!

Sa condition est pénible, insupportable… Ali leur a fait également savoir qu’il veut voir un ophtalmologue car sa vue à baissé, il devrait changer de lunettes. On ne lui a pas encore répondu.

En ce qui concerne la visite même, la prison est en dehors de la ville. Il y en a 2 Tiflet 1 et Tiflet 2..

Elles sont l’une à côté de l’autre.

Pour y accéder on a dû laisser la voiture assez loin et marcher une belle trotte avant d’y arriver.

Il n’y avait pas d’autres familles à ce moment-là.

J’ai frappé au portail et un fonctionnaire est sorti aussitôt. Après lui avoir dit qu’on venait pour rendre visite à un détenu, il nous a fait savoir que seulement 2 personnes pouvaient rentrer, donc je suis rentrée moi et ton frère Musti.

Malheureusement Famma l’épouse de ton père a dû rester dehors. On est rentré directement après la vérification des paperasses. On est passé par le contrôle des affaires qu’on a apportées, qui finalement ont toutes été refusées exception faite des fruits.

Après la fouille corporelle très minutieuse, on nous a indiqué la salle de visite. Nous sommes passés par un grand couloir avant d’arriver à cette salle, qui m’a paru très grande par rapport à celle de Salé. Il y avait au moins 10 tables avec des chaises autour d’elles.

Trois gardiens se tenaient assis là, à proximité, pour la surveillance. A part nous, il y avait 2 autres familles qui attendaient un proche. Ali est apparu le premier.

Dès qu il nous a vus, un grand sourire est apparu sur son visage qui s’est illuminé. Ton frère Musti lui a fait cette remarque :  » Que guapo estas hermano » (que tu es beau mon frère). Ali a éclaté de rire. Cela faisait plaisir de le voir ainsi rire. Il nous a serrés très fort dans ses bras, il ne nous lâchait plus…. puis a immédiatement demandé des nouvelles de tout le monde.

Mais juste après ça il a repris son air sérieux et a commencé à nous raconter toute la situation dégradante dans laquelle il est..

Il parlait vite et regardait souvent sa montre, comme s’il avait peur d’oublier quelque chose…pour ne rien oublier. Il nous a dit qu’on n’avait qu’à une demi heure de visite !!!! J’étais choquée, mais je n’ai pas voulu rajouter une couche supplémentaire à ce désastre dévastateur. Mais je me disais en mon fort intérieur : Mais c’est trop court !!!!! On l’a laissé parler sans l’interrompre.

Farida, il faut absolument le faire sortir de cette condition inhumaine. Moi je reste sans voix face à sa force morale. Il m’a fait savoir qu’ils n’arriveront pas à le briser. Mais je suis morte d’inquiétude, je sens qu’il ne tiendra pas, c’est trop !!!!

Il dit puiser sa force dans sa foi en Dieu, mais aussi en pensant beaucoup à sa famille et grâce à tout le soutien qu’il a à l’extérieur.

Un petit détail que j’ai oublié. Il n’a droit qu’à une seule douche par semaine. Lui ce qu’il fait c’est prendre deux bouteilles d’eau il les met avec lui pour dormir, au matin elles sont tièdes et se lave avec.

Je te précise qu’ils ne lui ont pas remis ses couvertures, j’ai dû les reprendre avec… Il met pour dormir sur une des couvertures fines des vêtements à lui pour amortir la dureté du béton.

Lui, pour l’instant, il veut juste que s’améliorent ses conditions de détention. »

Houria, épouse d’Ali Aarrass.

CLIQUEZ ICI

Act now ! Signez la pétition et achetez les livres sur Ali Aarrass ( 10 points de vente !)

Merci d’écrire à Ali Aarrass, n° d’écrou : 930, Prison de Tiflet 2, Tiflet, Maroc

dans Lettres/Letters/Brieven par

larmes-et-lettres-ali-aarrassJe vous remercie d’avance pour ce que vous ferez.
Mais j’aimerais que vous sachiez (même si je sais que je me répète) que Ali a toujours besoin de notre soutien à tous.
Il est en isolement dans une nouvelle prison. Même s’il dit qu’il va bien (je sais qu’il le dit surtout pour nous rassurer) il n’y connait personne. Les contacts téléphoniques sont réduits à une seule fois par semaine, ce qui l’isolera encore plus…. Il n’a personne au Maroc.
Ali n’aspire qu’à la paix, tant il a subi répression sur répression à Salé 2, et il n’est pas dans un lieu où il baignera dans le bonheur.
N’oubliez pas surtout qu’il s’agit d’un homme qui n’a commis aucun crime, qui a vécu l’innommable depuis plus de 8 ans.
L’arbitraire et encore l’arbitraire….

Alors de grâce ne l’oubliez pas.
Même une toute petite lettre avec quelques mots rassurants, du genre : Ali tu n’es pas seul !

Aussi, si vous craignez qu’en affichant vos noms vous courriez le moindre risque, prenez un nom d’emprunt. Un pseudo. Ali comprend que trop bien et nous aussi.

Je compte sur vous <3

Pour celles et ceux qui le veulent, sachez que chaque vendredi à 18h30, un groupe d’écriture s’organise autour d’une table à la cafet’ d’ESG asbl : rue d’Anderlecht, 30 – 1000 Bruxelles. (Anneessens)

Farida Aarrass

1 2 3 8
Aller à Top